Utile et fragile château de cartes

Ce matin, après la conférence d’un économiste de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) dans le cadre de la Conférence annuelle Hardlines à Toronto, j’ai demandé si lui, un expert en pronostic, était en mesure ou non de confirmer que la SCHL resterait en vie. Il m’a fourni une réponse censurée.

En réalité, voici le jeu politique qui se passe. La SCHL est une socité d’État chargée, depuis 1946, d’assurer les prêts hypothécaires difficiles, de soutenir le logement social et d’agir comme source de statistiques en matière d’habitation. Le ministre des Finances du Canada suggère depuis quelques jours sa privatisation.

Sans remettre en question les trois rôles, le présent gouvernement ose se questionner à voix haute sur la pertinence de voir une créature gouvernementale prendre des risques et en quelque sorte, jouer à la banque et à l’assureur, activités que pourraient volontiers tenir les institutions financières et les compagnies d’assurance, croit le ministre.

J’appuie le principe de ne rien considérer comme acquis. La société d’aujourd’hui n’est plus dans la situation d’après-guerre marquée par une pénurie de logements. Les taux d’emprunt de l’ordre d’un ou deux pour cent ont démocratisé l’accès à la propriété.

C’est pourquoi j’avais apprécié les contre-mesures que le même gouvernement a pris pour réduire les mauvais achats de propriété reposant sur des hypothèques de 40 an, en ramenant le plafond du terme à 25 ans.

Il était temps.

Quand on pense que le tiers du PIB du pays repose sur la capacité des consommateurs à rembourser correctement et entièrement leur prêt hypothécaire dont la SCHL s’est portée garante parce que, dans la plupart des cas, aucune banque à charte n’était disposée à s’exposer à autant de risque, ça engendre deux questions spontanées:

– Quelle banque ou quel fonds de capital de risque voudrait et pourrait prendre la place de la SCHL alors que l’équilibre du château de cartes relève de conditions non contrôlées: économie mondiale, politiques américaines, taux de chômage, etc?

– Si un privé reprenait néanmoins le portefeuille, n’exigerait-il pas un nantissement du gouvernement pour éviter d’être floué par d’éventuelles mauvaises transactions commises avant sa prise de possession?

Ce qui revient à dire que nous, les contribuables, dans tous les cas de figure, demeurons imputables pour le laxisme entourant les anciennes garanties de prêt, exacerbé par une probable hausse du taux d’intérêt qui ne restera pas éternellement à 1 %.

Alors laissons donc les choses ainsi. Les bonnes décisions de gouvernance ont été prises. Aller plus loin, jusqu’à tuer la SCHL, pourrait être un geste de trop.

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