Hier avait lieu à Montréal la deuxième table ronde d’une série de quatre, celle-ci réunissant des cadres de sept bannières ou groupements en quincaillerie. Les échanges transparents ont nourri l’élaboration en cours du Plan stratégique triennal 2025-2027 que pilote Crystelle Cormier, cheffe de la direction de l’AQMAT. L’animation des échanges a été confiée à Richard Darveau, président.
La première des consultations avait eu lieu entre marchands la semaine dernière à La Malbaie. Cliquez ici pour en lire le compte-rendu.
État du marché
Les représentants des bannières partagent l’opinion majoritaire des sondés à l’effet que le marché demeure calme, plus qu’en moyenne, mais sans cynisme, ils se demandent à voix haute s’il existe encore une normalité. L’un dit même : « Aujourd’hui, la normalité, c’est qu’on sait moins qu’avant de quoi la journée ou la semaine sera faite en termes d’activité. Tout est plus volatil, qu’il s’agisse de la météo ou de la situation sociale ou politique. »
Quant aux deux-trois années à venir, généralement, les participants tombent d’accord pour croire que la vague de baisses des taux d’intérêt qui semble s’installer prendra des mois, voire une année, à engendrer un marché de la construction de nouveau dynamique et à la hauteur des besoins de la population.
Il était intéressant de constater que d’une région à l’autre, même en comparant deux quincailleries de la même bannière et de la même taille, les résultats des ventes pouvaient grandement différer, comme si d’autres facteurs de nature plus locale ou régionale pouvaient aussi influer. Ceci a conduit l’animateur, Richard Darveau, à souligner « l’importance de la qualité des gestionnaires et de leur accès à des informations contextualisées et actualisées pour suivre ce qui se passe et tenter de voir venir les mouvements dans chaque marché. »
Principaux enjeux
La pression exercée sur les marchands depuis l’augmentation des salaires et autres coûts attenants persiste depuis la pandémie sans pouvoir être absorbée par des ventes importantes en volume.
Angle mort de la main-d’œuvre : les conditions perdantes pour embaucher les jeunes retraités.
Les participants à la table ronde sont unanimes à dénoncer le manque d’attrait fiscal pour inciter des citoyens expérimentés, désireux de demeurer actifs, à offrir leurs services à leur quincaillerie locale; implicitement, un mandat venait d’être donné à l’AQMAT pour faire des représentations aux ministres des Finances, du Revenu, du Travail et de l’Économie afin de faire profiter les consommateurs des conseils et de l’attitude serviable que peuvent prodiguer des hommes et des femmes issus de l’industrie de la construction dans le sens large.
On s’est aussi interrogé, sans toutefois que l’échange soit concluant, sur la possibilité pour les autorités gouvernementales de catégoriser les emplois étudiants à temps partiel – un peu comme on a choisi de le faire avec le salaire minimum pour le personnel sujet à des pourboires – de manière à ce que les employeurs puissent leur accorder un salaire horaire de base plus bas que celui offert à leurs effectifs permanents. La question mérite réflexion…
Par ailleurs, les participants ont même osé parler de déflation à propos du prix de plusieurs catégories de matériaux, ce qui a pour effet que les ventes, en plus d’être faibles, dégagent moins de marge.
Il y aurait une différence assez marquée entre la clientèle des entrepreneurs (les pros), laquelle s’adapterait plus rapidement et comprendrait mieux les variations de prix et d’intérêt que les consommateurs, ces derniers ayant tendance à réagir plus lentement.
Parmi les autres enjeux socio-économiques qui leur semblent les plus cruciaux, notons les cinq suivants.
- Habitation et main-d’œuvre: la crise du logement serait étroitement liée à la disponibilité relative des employés : on a besoin de têtes et de bras dans les manufactures de matériaux et sur les chantiers pour augmenter la cadence. Dans la même veine, le resserrement des normes sur l’immigration et l’accès à la main-d’œuvre étrangère serait perçus par certains comme faisant plus partie du problème que de la solution.
- Stimulation de la rénovation et de la construction écoénergétiques: une subvention ou un crédit d’impôt pour rénovations et constructions à caractère écoénergétique et d’une certaine ampleur financière est nettement attendue. Seul bémol, les programmes au retour financier trop lointain ou aux procédures trop tatillonnes seraient plus difficiles à apprécier des consommateurs.
- Promotion de la relève: les participants souhaitent que l’AQMAT mette en vedette des relèves réussies en plus d’accompagner les autres familles en affaires qui sont dans ce processus. Dans le même ordre, les dirigeants des bannières se sont montrés enthousiastes face au projet de mettre sur pied une formation certifiée pour les gestionnaires de la relève.
- Éducation et conseils en vols et fraudes: l’augmentation des vols a été décriée avec ses impacts non seulement sur les pertes financières des marchands, mais aussi sur l’expérience client, étant entendu que des marchandises de plus en plus sous clé, n’est jamais perçu positivement par les clients ou les employés. Par à-coup, l’AQMAT hérite ici aussi d’un mandat d’éducation auprès des troupes afin de réduire le fléau, à défaut de l’annihiler complètement.
- Heures d’ouverture concertées: tout un chacun constate que des quincailleries commencent à rouvrir les dimanches sous le coup de l’influence exercée par des concurrents. Ceci affecte les marges et la gestion des horaires. La solution ultime reste celle préconisée par l’AQMAT : obtenir le droit légal de se parler entre quincailleries d’une même région pour tenter de coordonner les horaires. Les représentations en ce sens continueront donc.
Projet d’activités
Parmi la brochette d’idées proposées par des membres de l’AQMAT ou pensées par la direction de l’organisme dans le cadre de l’actuelle planification stratégique, il y en a cinq qui ont été soumises à l’appréciation des représentants des bannières.
- Plateforme de références d’entrepreneurs qualifiés dans les centres de rénovation: en toute transparence, on s’est demandé s’il ne s’agissait pas d’une fausse bonne idée. Il est vrai que les consommateurs qui ne sont pas manuels ou qui manquent de temps aimeraient recevoir de leur quincaillerie des références de professionnels de la construction. Le but est louable, l’AQMAT devra cependant réfléchir aux bons partenaires, au mode de sélection et surtout, à l’enjeu de la mise à jour de tels répertoires.
- Rencontres entre acheteurs de bannières et fournisseurs de type « Meet the buyers »: les participants se sont montrés surpris de l’idée, jugeant que leurs acheteurs sont faciles à joindre ou quand ils ne le sont pas, c’est possiblement par manque d’intérêt ou parce qu’ils sont heureux de l’entente qu’ils ont avec un autre fournisseur. On verra vendredi, lors de la table ronde des fabriquants, ce que, eux, pensent du projet de face-à-face avec des acheteurs des bannières.
- Tableau de bord prédictif appelé le Périscope: l’objectif de fournir aux marchands des comparaisons fiables de leurs ventes avec d’autres quincailleries de même taille et d’une même région a laissé certains participants dubitatifs : soit qu’ils doutent de l’intérêt soutenu des marchands à fournir leurs données, soit qu’ils jugent que l’information déjà disponible par les groupements suffit. La direction de l’AQMAT peaufinera le projet, entre autres en lui greffant un module de comparaison des salaires et avantages sociaux pour la dizaine de principaux emplois qu’on retrouve dans toute quincaillerie.
- Salon d’achats unifié ou foire spécialisée dans les produits locaux: le double sujet qui intéresse environ un membre sur trois de l’AQMAT s’est élargi sur la pertinence en général des salons physiques en cette ère où le numérique occupe de plus en plus de place et où, surtout, les commandes des marchands et de leurs groupements se font beaucoup moins à dates fixes qu’auparavant, ceci notamment en raison des coûts d’entreposage et des risques associés à d’éventuelles baisses de prix. Pour toutes ces raisons, la haute-direction de l’AQMAT ne pense pas recommander au conseil d’administration d’organiser un nouveau salon physique. Elle entend plutôt inventorier des moyens pour « revamper » les salons des bannières, notamment avec la présentation de produits innovants de manière interactive et celle de produits accrédités « Bien fait ici ».
- Campagne sur les carrières en quincaillerie: l’idée de soutenir une campagne de publicité et/ou de relations publiques prônant les carrières en quincaillerie durant la semaine thématique tenue à la fin de septembre chaque année sourit aux représentants des bannières. Il a été convenu qu’un projet serait élaboré et soumis ultérieurement à leur considération.
Pour sa part, la direction de l’AQMAT a maintes fois évoqué le besoin d’un code de comportement éthique entre bannières et fournisseurs dans une optique de réel partenariat, le but étant de donner le goût à un plus grand nombre de fabricants et de distributeurs de faire affaire avec les groupements de notre industrie. Tant Mme Cormier que M. Darveau ont assuré les participants que le projet de plan stratégique qui sera adopté placera cet enjeu haut dans les priorités tant il touche toutes les parties prenantes de notre écosystème.
excellente façon de faire de communiquer les enjeux à tous les acteurs de notre industrie. Bravo et de prendre le pouls de chaque tranche d’activité dans le seul but commun : satisfaire la clientèle.