« Le monde est fou », chantait Beau Dommage. J’apporte dans mes bagages, à destination du continent africain, mitaines, pantalons, chaussettes et même sous-vêtements en Gore-Tex et, d’ici là, je dors pratiquement sur ma terrasse tellement la chaleur se fait accablante.
Même que l’agence avec laquelle je transige en Tanzanie pense que je me fous d’elle avec mes 40 degrés au pays de l’esquimau.
Le plus ridicule de l’affaire, c’est l’entraînement. Nous sommes quinze personnes à se mesurer au Kilimandjaro, plus haute montagne seule au monde* et unique toit enneigé de l’Afrique. On tente de reconstituer le plus possible les conditions qu’on vivra : journées entières à monter (ou à descendre) avec de bonnes charges et vêtus de manière à affronter le froid appréhendé, la nuit encore plus que le jour.
Allez courir, vous, ces jours-ci, au Québec, avec polar, bottes d’hiver aux pattes et douze kilos dans le sac à dos, vous m’en donnerez des nouvelles! Et que dire de tenter de dormir en camping dans un sac de type momie; juste la chandelle achetée pour enlever l’humidité dégagera trop de chaleur pour ne pas vous énerver!
Le monde est fou, donc, et les temps sont durs. Je ne parle pas des paragraphes d’avant, de ceux qui suivent.
La prostitution est une condition extrême de survie. Elle ne constitue un destin ni enviable ni souhaitable. C’est pourquoi plusieurs des femmes qui la pratiquent tentent d’en sortir.
L’ascension du Kilimandjaro n’est en fait qu’un prétexte pour financer la Maison de Marthe, organisme de bienfaisance palliant à l’absence de tout programme gouvernemental pour aider les femmes à s’extirper de la prostitution et de la spirale de drogue et de violence qui les garde prisonnières.
Menée par Rose Dufour, docteur en anthropologie de la santé et auteure d’un livre de référence sur le phénomène social de la prostitution, la Maison de Marthe a développé une démarche d’intervention novatrice basée sur trois concepts clés qui consistent à mobiliser les prostituées en elles et entre elles, et à faire de même avec la collectivité. Une approche où l’obligé sang-froid scientifique côtoie la passion pour la vie, la vie digne.
Nous sommes donc un groupe hétérogène par notre âge (de 17 à 60 ans) et tant d’autres différences, mais uni par la volonté de donner au mot humanité quelque lettre noble, et qui troquera, le 20 juillet, la chaleur du Québec pour le froid africain.
Dernière condition à remplir, hormis de poursuivre un entraînement intense : boucler le budget pour financer la cause.
Pour me soutenir, visitez mon mini site Web, http://www.rouletaboule.org/. Les sommes recueillies serviront principalement à accompagner les femmes, ce qui inclut souvent une désintoxication de première ligne, diverses thérapies, un aide à la survie et à la réinsertion sociale, scolaire et professionnelle.
P.-S. : Photo prise le week-end dernier dans la fraîcheur de la vallée de la Jacques-Cartier pour un dernier entraînement en groupe.
*L’Everest fait partie de la chaîne de l’Himalaya alors que l’Aconcagua en Argentine, de celle des Andes.