L’extraordinaire acquisition en cours de Lowe’s est venue bouleverser non seulement le paysage bouchervillois, mais aussi le quotidien de l’Association.
Au total, 17 entrevues médias en dix jours, abordant des épisodes naissant l’un après l’autre, comme des poupées russes, à mesure que la saga progressait.
Au début, l’intérêt des journalistes était concentré sur la transaction elle-même. Puis il s’est déplacé vers les risques encourus par les fournisseurs de RONA, surtout ceux du Québec, pour ensuite se pencher sur le devenir des marchands affiliés et enfin, s’intéresser sur les bénéfices récoltés par les hauts dirigeants en rapport à leurs performances des trois dernières années.
Il nous a fallu remettre plusieurs fois les pendules de l’opinion publique à la bonne heure. Les gens et les journalistes mettaient tout et tous dans un même panier : employés des magasins RONA affiliés vendus à un employeur américain ( !), bouleversement immédiat de la chaîne d’approvisionnement qui cède sa place à celle de Lowe’s ( !!), changement des marquises en façade des magasins pour installer la bannière bleue ( !!!).
Nous avons aussi dû démystifier les différences entre l’approche organique de Home Depot vs la stratégie actuelle d’acquisition de Lowe’s afin d’expliquer que ces derniers avaient peu intérêt à laisser tomber une marque aussi aimée au Québec que RONA alors que l’américaine orange, elle, à son débarquement ici, en 2000, poursuivait un tout autre agenda, soit d’implanter sa réputation et ses couleurs.
Nous avons surtout eu à dépolariser les acteurs en jeu qu’on dépeignait, en raison des émotions élevées en jeu, comme RONA-le-bon et Lowe’s-le-méchant.
D’abord, cette seconde offre n’est pas hostile. Elle résulte de grés mutuels.
Ensuite, il a fallu parler d’affaires, pas de nationalisme, pour exposer les motifs marketing appuyant la thèse que Lowe’s au Canada doit offrir des marques qui sont populaires et consommées par les consommateurs d’ici et par nos entrepreneurs.
En d’autres mots, RONA, toute québécoise soit l’entreprise, offre sur ses tablettes, dit-on, environ 50 % de produits d’ici. Elle le fait un tout petit peu parce qu’une frange estimée à 15 % de sa clientèle demande des produits locaux. Mais elle le fait surtout parce que les produits que les fabricants et distributeurs leur proposent concordent avec la lecture que ses acheteurs font de ce que leurs clients veulent en termes de prix de vente, de caractéristiques techniques ou esthétiques ou encore ergonomiques, d’emballages, etc.
Croire que les acheteurs de Lowe’s pousseront plus de produits américains par nationalisme est irrationnel. Ils le feront si ces derniers s’avèrent plus compétitifs que les nôtres et s’ils ont des raisons de croire que leurs ventes connaîtront plus de succès que les marques tenues par RONA, qu’elles proviennent de compagnies québécoises, canadiennes ou d’ailleurs…
Tout ce cirque a forcé la toute nouvelle ministre Anglade, responsable de l’économie au gouvernement du Québec, a créé un groupe aviseur composé de divers ministères et organismes, avec le mandat de proposer des mesures visant au soutien et à la croissance des fournisseurs potentiellement touchés par l’acquisition.
L’AQMAT y jouera un rôle-clé.