Le président et chef de la direction de l’AQMAT partage les inquiétudes communiquées par son homologue du Conseil québécois du commerce de détail alors que s’amorce aujourd’hui les négociations du nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA) à Montréal sur les problèmes d’iniquité fiscale encore plus grands qui planent à l’horizon pour les détaillants du Québec. Les manufacturiers non Américains sont aussi à risque si l’ALENA disparaît ou est gravement amendée.
Lors d’un point de presse tenu dans un magasin de la bannière Sports Experts situé sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, Léopold Turgeon, président-directeur général du CQCD, a abordé la question du seuil de minimis qu’il juge crucial pour le secteur du commerce de détail. Il s’agit du montant d’argent en-dessous duquel les produits achetés en ligne à l’extérieur du pays sont exempts de taxes et de frais de douane.
« Nous savons que le Canada subit des pressions pour augmenter son seuil de minimis de 20 $ à 800 $. Ce serait totalement inéquitable envers nos détaillants qui sont tenus de payer des droits de douanes, lorsqu’applicables, et de prélever les taxes. Si cela se concrétisait, des milliers de commerçants québécois et canadiens seraient fragilisés, voire même fermeraient leur commerce, surtout les PME » – Léopold Turgeon, PDG du CQCD.
Selon une étude récente effectuée par l’économiste Pierre Emmanuel Paradis pour le CQCD, 86 % des produits achetés sur Internet ont une valeur inférieure à 200 $. Selon ces estimés, l’élimination du seuil de minimis pourrait mener à une perte allant de 700 millions de dollars à près de 1,6 milliard de dollars en taxes et frais de douane. Par conséquent, les détaillants québécois et canadiens ne pourraient être en mesure de concurrencer ceux des États-Unis. Cela viendrait inévitablement fragiliser les commerces d’ici, particulièrement les petites et moyennes entreprises.
Paul-André Goulet, propriétaire de la franchise Sports Experts, s’est également exprimé en rappelant l’iniquité que vivent présentement les détaillants, tout en présentant les dangers potentiels d’une hausse du seuil de minimis :
« Les entreprises de chez nous payent des tarifs douaniers sur les produits qu’elles importent et sont obligées de prélever les taxes à la consommation lors de la vente. Si le seuil de minimis est revu à la hausse, elles seront incapables d’être compétitives au niveau des prix en comparaison avec les compagnies américaines et mexicaines, qui ne connaitraient pas les mêmes contraintes lorsqu’elles pénètrent le marché canadien via internet » – Paul-André Goulet, propriétaire de la boutique Sports Experts de la rue Sainte-Catherine Ouest et d’une dizaine de magasins Sports Experts et Atmosphère.
Par ailleurs, le CQCD souhaite rappeler que l’Australie a baissé son seuil de minimis à zéro, après avoir expérimenté une augmentation à 1000 $, afin de s’assurer de la compétitivité de ses détaillants et de récupérer les pertes fiscales encourues. Le Canada devrait s’en inspirer et suivre cette tendance observée au sein d’autres pays membres de l’OCDE.
Impacts sur les manufacturiers québécois
Richard Darveau rappelle aussi à quel point les mécanismes de libération de la circulation des biens et des personnes que permet un accord de libre-échange sont devenus stratégiques pour nombre de manufacturiers d’ici : « Si on perd les mécanismes d’ouverture du marché continental avec les outils d’équité qu’un tel accord nous apporte, on place les opérateurs canadiens dans une situation plus handicapante pour leurs exportations ».
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Vignette photo de l’entête : Ildefonso Guajardo Villarreal, Chrystia Freeland et Robert Lighthizer, qui dirigent respectivement les discussions au nom du Mexique, du Canada et des États-Unis.
Photo : La Presse canadienne