Le faux débat sur les heures d’ouverture, le vrai enjeu de compétitivité de nos commerces

L’AQMAT ne demande pas que les commerces ferment systématiquement les dimanches. Nous n’exigeons pas non plus que la Loi sur les heures et les jours d’admission dans les établissements commerciaux soit modifiée. En 1992, les modifications à ladite Loi n’ont pas seulement permis l’ouverture des commerces les dimanches, mais tous les soirs de semaine également. Nous n’invoquons pas le manque de main-d’œuvre comme principale raison de débattre des heures d’ouverture.

Replaçons les faits.

Un sondage scientifique CROP a été réalisé entre le 13 et le 27 mars 2023 auprès de 1 000 Québécois propriétaires de leur habitation qui ont fréquenté une quincaillerie ou un centre de rénovation au cours des 12 derniers mois.

L’enquête révèle que bon nombre de clients voient leurs attentes déçues en termes de nombre d’employés, de leurs compétences ou de leur niveau d’engagement, attribuant des notes de satisfaction de 24 %, 29 % et 30 % à chacune de ces dimensions du service client. Pire, 74 % ont souvent ou occasionnellement attendus trop longtemps en file à la caisse, 69 % ne sont disent ne jamais avoir pu obtenir conseil et 54 % ont dû quitter le magasin bredouilles, faute de service.

Leurs attentes en termes de qualité et de quantité de services sont si élevées que 63 % préféreraient que les quincailleries ouvrent moins d’heures pour accéder en contrepartie à du personnel qualifié en tout temps que de conserver l’horaire actuel sans assurer la présence de personnel qualifié (37 %).

À la question des heures d’ouverture, 69 % des répondants ne seraient pas du tout ou peu dérangés si les quincailleries fermaient tous les dimanches. Le taux d’approbation monte à 76 % si ces magasins ouvraient de 10 h à 18 h du lundi au vendredi plutôt que de 8 h à 21 h.

En réaction au coup de sonde, la direction de l’AQMAT a été heureuse de constater l’attachement de la population à leurs quincailleries et surtout, leur compréhension solidaire face aux défis de gestion qui se posent à elles.

Force est de constater que c’est la dilution de l’expérience client en magasin qui fait défaut, plus encore que la rareté de main-d’œuvre.

Contextualisons.

Tant le consommateur que l’employé de commerce ont bien changé depuis la loi de 1992. À l’époque, le consommateur travaillait majoritairement de 9 h à 17 h du lundi au vendredi, sans accès au télétravail, aux plages horaires flexibles ni aux achats en ligne, d’où la lucidité du législateur d’avoir permis d’ouvrir les soirs et les week-ends. Aujourd’hui, à peine le quart de la population québécoise est prise de 9 h à 17 h derrière des bureaux physiques.

Lors de l’adoption de la loi, on ne frisait pas du tout le plein emploi comme aujourd’hui, si bien que chaque poste à pourvoir recevait une centaine de CV. De nos jours, on est heureux d’en obtenir un seul!

Mais la pièce-clé du casse-tête, que cherche tout client dès son arrivée en quincaillerie, c’est l’employé d’expérience : il exige dorénavant du marchand de ne plus se taper les soirs et les week-ends en magasin.

Bref, un commerce de détail peut concurrencer Amazon et consorts s’il peut compter sur du personnel qui affiche un savoir-faire, une bonne formation et un engagement. À cela s’ajoute un inventaire suffisant, car aucun scénario n’est pire pour le client qui sort d’un magasin physique que de n’avoir pu trouver la couleur, le format ou la marque qu’il convoitait.

Conserver et former ses effectifs tout en visant à augmenter ses pieds carrés pour un meilleur inventaire, tout cela rime avec investissements, d’où la nécessité pour de plus en plus de marchands de compresser leurs coûts d’opération. Un horaire réduit peut dégager des ressources pour bien rémunérer le personnel fidèle et son perfectionnement ainsi que revoir ses capacités d’entreposage.

Amazon est rapide. Certes. Mais jamais autant qu’un magasin physique d’où on sort avec sa marchandise avec en bonus tous les renseignements et les conseils qu’aucune plateforme électronique ne peut offrir.

Nos actions.

Les commerces qui désirent réviser leur horaire d’ouverture ont besoin d’aide afin d’en minimiser les impacts sur leur clientèle.

Via son Collège AQMAT, l’association doit actualiser la formation des gestionnaires de quincailleries face aux nouvelles réalités.

Une solution créative et légale doit être imaginée pour que des marchands concurrents puissent se parler d’horaire d’ouverture sans que cela ne soit assimilé à de la collusion.

 

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