Le dépôt du budget fédéral hier survient au moment où les planètes semblent vouloir s’aligner favorablement pour notre secteur d’activité. La Presse avait raison de titrer : « Le logement, la vedette du budget ».
D’abord, jetons un œil sur les mises en chantier. Bien qu’encore insuffisantes pour soutenir la croissance démographique, les deux statistiques de mars donnent espoir :
- il y a eu construction de 293 maisons individuelles versus 224 durant le même mois en 2023, soit une différence positive de 31 %;
- même amélioration du côté des logements avec la construction de1929 unités en mars 2024 contre 1575 en mars 2023, une hausse de 29 %.
Il faut dire que la pression s’annonce moins forte sur le marché du logement pour deux raisons : la baisse notable du nombre d’immigrants temporaires et le taux de natalité domestique le plus bas au pays depuis un siècle.
Ensuite, Polichinelle et tout le monde anticipe que la Banque du Canada réduira de 25 ou 50 points son taux directeur; c’est tellement probable que les banques prêtent actuellement à des taux de 4,75 % pour des hypothèques fixes sur plusieurs années, soit sous la barre du 5 % qu’elles paient elles-mêmes pour leurs devises.
Et surtout, l’économie du Canada se porte assez bien, en tout cas l’épouvantail d’une récession semble avoir été gardé à distance jusqu’ici.
Cela étant, le gouvernement fédéral semble plus compréhensif des enjeux qui se dressent en logement que son homologue québécois, en particulier pour les nouvelles générations.
La crise du logement qui sévit au pays, particulièrement depuis la pandémie, prend une place importante dans le nouveau budget. Ottawa investira 8,6 milliards d’ici 2028-2029 dans différentes mesures, notamment pour accélérer la construction
Comme tous les autres observateurs, l’AQMAT salue le Plan du Canada sur le logement avec sa panoplie de mesures visant à faciliter l’accès à la propriété, à soutenir les infrastructures municipales ainsi qu’à encourager les rénovations écoénergétiques et l’accroissement de la densité des habitations existantes.
Soulignons notamment cinq engagements constructifs (excusez le jeu de mots facile) :
- après sa taxe de 1 % sur les logements vacants ou sous-utilisés s’ajoute un autre 1 %, cette fois applicable sur les terrains vacants afin de forcer l’utilisation de ceux-ci pour la construction résidentielle;
- le remboursement de la TPS pour les habitations neuves incluant une exemption de cette même taxe pour les logements locatifs sociaux et abordables;
- la période d’amortissement des prêts hypothécaires qui passe de 25 à 30 ans pour les premiers acheteurs et même à 35 ans pour les bâtiments certifiés écoénergétiques;
- la hausse du Régime d’accession à la propriété (RAP), et son équivalent appelé le CELIAPP, qui permettra à partir du 1er août de placer à l’abri de l’impôt 60 000 $ au lieu de seulement 35 000 $ pour la mise de fonds d’une première propriété, en plus d’exiger le remboursement de ce déplacement après cinq ans au lieu d’à la fin de la première année;
- l’ajout d’une dimension intergénérationnelle à ces deux régimes permettant aux parents et aux grands-parents de contribuer à la mise de fonds de leur(s) enfant(s) ou petit(s)-enfant(s) et d’augmenter ainsi les retraits maximaux permis en RAP ou CELIAPP.
L’AQMAT apprécie également que le gouvernement promette de construire des logements sur des terrains de Postes Canada et de la Défense nationale et qu’il convertira des immeubles de bureaux fédéraux.
À ces mesures bien concrètes s’ajoute le Programme de prêts pour la construction d’appartements où le gouvernement ajoute une grosse tranche de 15 milliards de dollars. L’AQMAT partage toutefois l’avis des organismes sociaux que des conditions devraient être resserrées afin d’avoir droit à des prêts afin de forcer la mise en chantier de logements abordables.
Richard Darveau, président de l’AQMAT, va même plus loin : « Si on construit plus, mais sans privilégier les logements gérés par des organismes sans but lucratif, on ne met pas les plus démunis de la société à l’abri de la spéculation. » Le porte-parole de l’association prend à témoin le cas du quartier montréalais de Griffintown où de grandes quantités d’appartements à vendre et à louer ont été construits, plus que partout ailleurs. Mais s’agissant de condos assez chers, les classes pauvre et moyenne n’ont jamais pu s’y loger et le prix moyen des logements libres a continuer d’augmenter.