La crise comme catalyseur d’une modification sociétale vers de l’achat vraiment local

Le président et chef de la direction de l’AQMAT a écrit à midi au premier ministre du Québec pour le sensibiliser au véritable sens de l’achat local, soit d’acheter des produits fabriqués ici.

Monsieur François Legault, Premier Ministre du Québec,

Tant bien que mal, les quincailleries et centres de rénovation, classés parmi les commerces essentiels, tiennent le fort depuis le premier décret gouvernemental sans qu’aucun drame ne soit heureusement survenu.

Les chantiers résidentiels vont devoir rouvrir, l’épée de Damoclès du 1er juillet planant sur la tête de milliers de familles. Dans cette perspective, notre association s’active pour que les entrepreneurs accèdent, dans nos magasins, aux fournitures sanitaires que prescrira le guide attendu de la CNESST. À cela s’ajoutent conseils et encadrement également prodigués par les associations patronales d’entrepreneurs et la partie syndicale, tous à l’unisson, pour que l’activité reprenne avec une prudence redoublée, tant en quincaillerie que sur les chantiers.

Dans cette gestion de crise, le gouvernement comme chacune de nos organisations remarquent l’effet en cascade de chaque fermeture, mais aussi de chaque réouverture. Or, la reprise des chantiers de construction doit, selon nous, également donner le feu vert aux manufacturiers québécois de reprendre leurs activités.

Mieux encore, la fenêtre est opportune pour positionner les articles de quincaillerie et matériaux fabriqués dans des usines d’ici qui peuvent approvisionner tout ce qu’il faut pour construire et rénover des maisons de la cave au grenier.

Mais reculons d’abord d’un pas.

Nous avons sondé les manufacturiers la semaine dernière. Les deux tiers des dirigeants d’usines se disent « très affectés » par la fermeture des chantiers et souhaitent leur réouverture dès que possible. Plus longtemps dure l’inactivité, plus augmente le risque de perdre le personnel mis à pied temporairement et manquer de temps pour produire à la hauteur des demandes des clients.

Il est vrai aussi que les centres de rénovation seront vite en rupture de stock puisque même avant le coronavirus, la distribution venait d’être affectée par le blocage ferroviaire. De plus, les besoins des hôpitaux en fournitures, plexiglass et autres accessoires ont fait fondre l’inventaire dans plusieurs départements de nos magasins.

Mais la motivation principale qui doit conduire l’État québécois de permettre de nouveau à nos usines d’opérer et de faire la promotion de leur production – bien sûr, dans le respect des plus strictes normes de santé publique – trouve sa source dans un mot que je répète: l’opportunité.

Parce que les pays asiatiques ne pourront assurer à nos centres de rénovation leur lot habituel de produits, parce que les Américains voudront privilégier leur marché domestique, parce que la population renoue avec le commerce de proximité auquel se consacre Le Panier Bleu, les planètes nous semblent alignées pour passer à une autre étape : faire connaître auprès des entrepreneurs en construction et des propriétaires-rénovateurs les produits de qualité qui sortent des usines d’ici.

Longue introduction pour proposer que s’organise une vaste offensive des articles de quincaillerie et des matériaux de construction faits au Québec.

Nous avons répertorié et trié tout ce qui sort des usines, des scieries, des entrepôts pour établir cet état des lieux : notre secteur est un des rares, avec l’agro-alimentaire, à pouvoir livrer un produit fini, de sa fabrication jusqu’à sa consommation, ce qui n’est hélas pratiquement plus possible dans aucun autre secteur, incluant l’automobile, la santé, les appareils électroniques et électroménagers, le vêtement et la chaussure, le divertissement dont les articles de sport, etc.

Notre organisme peut décliner les produits faits à Saint-Georges-de-Beauce ou Victoriaville, à Yamachiche ou à Lachine, à Lévis aussi bien que dans la vallée de la Matapédia qui s’assurent du respect des codes de construction en vigueur, ce qui confère de la valeur aux propriétés par l’intégration de composants garantis, de la quiétude aux assureurs, un renforcement des régions et un resserrement du tissu manufacturier qui en a bien besoin, car fortement étiolé au cours des dernières décennies.

Comme vous le constatez, une telle mission transcende la transaction de dollars et porte une dimension sociétale assez puissante pour modifier le rapport des citoyens aux biens qu’ils consomment, à tout le moins ceux liés à ce qu’ils chérissent le plus, leur maison.

Nous pensons qu’une bonne campagne, bien orchestrée, bien ciblée, comme Aliments du Québec le fait depuis dix ans avec l’aide de ses membres et du MAPAQ, le gouvernement peut être un « game changer » et ce, très rapidement.

Soyez assuré que nos fabricants et leurs réseaux de vente sont volontaires à être les partenaires de votre gouvernement pour sortir de la crise en rebondissant dynamiquement et durablement.

Veuillez agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma considération distinguée.

Le président et chef de la direction

Richard Darveau

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