La clause de révision de prix à l’ère de l’inflation et des pénuries

Nombre de centres de rénovation hésitent, voire refusent de soumissionner sur les appels d’offres de leur municipalité ou de paliers supérieurs de gouvernement en raison de la rigidité des critères de prix : ils ne veulent pas être forcés de livrer des matériaux alors que les prix auront possiblement augmenté drastiquement. Existe-il des moyens de se prémunir contre des prix en yoyo ?

L’avocat et chroniqueur juridique Rafik M. Bentabbel donne aux membres de l’Association de la construction du Québec quelques conseils dont peuvent s’inspirer les membres de l’AQMAT.

D’abord, précisons que le risque varie grandement selon le type de contrat liant l’entrepreneur en construction et son client-propriétaire. Voici une brève analyse  des deux types de contrats de services courants en droit de construction soit le contrat à coûts majorés et le contrat à forfait.

Le contrat à coûts majorés

Ce contrat, couramment appelé « cost plus » est défini à l’article 2108 du Code civil du Québec : « 2108. Lorsque le prix est établi en fonction de la valeur des travaux exécutés, des services rendus ou des biens fournis, l’entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, à la demande du client, de lui rendre compte de l’état d’avancement des travaux, des services déjà rendus et des dépenses déjà faites. »

Dans le contexte actuel, Me Bentabbel de l’étude Bélanger Paradis indique que ce type de contrat est à favoriser afin d’éviter à l’entrepreneur d’assumer seul le risque d’une augmentation inattendue du prix des matériaux ou de l’inflation, et ce, sans avoir à le prévoir contractuellement. L’entrepreneur aura cependant intérêt à informer son client de l’état d’avancement des coûts engagés au fur et à mesure de l’exécution des travaux pour éviter un litige à la fin du projet.

Le contrat à forfait

Quant au contrat à forfait, également appelé « contrat à prix fixe », celui-ci est défini à l’article 2109 du Code civil du Québec : « 2109. Lorsque le contrat est à forfait, le client doit payer le prix convenu et il ne peut prétendre à une diminution du prix en faisant valoir que l’ouvrage ou le service a exigé moins de travail ou a coûté moins cher qu’il n’avait été prévu.

Pareillement, l’entrepreneur ou le prestataire de services ne peut prétendre à une augmentation du prix pour un motif contraire. Le prix forfaitaire reste le même, bien que des modifications aient été apportées aux conditions d’exécution initialement prévues, à moins que les parties n’en aient convenu autrement. »

Dans un contrat à forfait, précise l’avocat-chroniqueur, les entrepreneurs auront tout intérêt à prévoir une clause écrite de révision de prix au contrat. Évidemment, il faut que les clients consentent à l’inclusion d’une telle clause lors de la signature du contrat, qui pourra initialement être indiquée dans la soumission de l’entrepreneur. Également, cette clause devrait prévoir un mécanisme de remise diligente de toutes les pièces justificatives prouvant la variation des prix, entre le moment de la soumission et la réalisation des travaux, et le caractère imprévisible de cette variation.

Cette clause peut également être avantageuse pour le client-propriétaire. En effet, les auteurs Me Pierre Cimon et Me Ian Gosselin écrivaient que « bien qu’en apparence ces clauses [de variation de prix] semblent être au seul bénéfice de l’entrepreneur, elles offrent en réalité des avantages indéniables au propriétaire. En effet, leur finalité est de favoriser avant tout le parachèvement des travaux en excluant systématiquement l’annulation pour cause d’erreur, en contrepartie de l’assurance accordée à l’entrepreneur d’ajuster le prix de son contrat dans une telle éventualité. »

À noter

Une telle clause ne pourra être incluse unilatéralement dans une soumission pour un contrat public octroyé par appel d’offres ni dans une soumission au BSDQ lorsque les documents d’appels d’offres ne le permettent pas.

Aussi, si vous souhaitez inclure une clause de révision de prix à un contrat ou à une soumission privée, veuillez consulter un cabinet d’avocats, car certains éléments factuels peuvent avoir une incidence importante sur la validité d’une telle clause.

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