L’imposition de droits compensateurs pour le bois d’oeuvre canadien par les États-Unis va nuire aux scieries de nos régions. C’est certain. Mais si les débouchés des producteurs de bois d’ici sont plus difficiles d’entrée aux États-Unis, le phénomène pourrait-il avoir en quelque sorte un effet positif sur l’approvisionnement parfois chaotique dont sont victimes les centres de rénovation?
La question, d’apparence tordue, mérite d’être posée. L’AQMAT enquêtera.
«Chose certaine, il faut sécuriser l’approvisionnement local, régional et même national pour nos centres de rénovation», a confié Richard Darveau, président et chef de la direction de l’AQMAT. Pour lire un de ses blogues sur le le sujet.
Pour comprendre le différend Canada-USA
La fin de la période de grâce d’un an que s’étaient accordée le Canada et les États-Unis dans le dossier de l’Accord sur le bois d’oeuvre, hier soir, ouvre la porte à l’imposition d’une taxe aux producteurs canadiens, qui auront du mal à le supporter selon les experts de l’industrie.
«L’imposition de droits compensateurs pour le bois d’oeuvre va faire très mal à votre région. Plusieurs scieries ne seront plus rentables», a indiqué le professeur de foresterie de l’Université Laval, Luc Bouthillier, au journal Le Quotidien.
Les producteurs américains peuvent maintenant déposer une plainte devant l’International Trade Commission sur les «préjudices subis ou susceptibles de se produire».
«Aussitôt que la plainte qui sera déposée d’ici quelques semaines sera jugée recevable, ce qui se fera vraisemblablement au début de 2017, des tarifs compensateurs et peut-être même des quotas seront déterminés unilatéralement le temps que les fonctionnaires de l’Administration du commerce international analyse la plainte, ce qui pourrait prendre de six mois à deux ans. Vous voyez donc que ça va prendre du temps», a-t-il ajouté.
Les producteurs canadiens pourraient se voir imposer dès mars 2017 une taxe pouvant atteindre 25 % de leurs exportations.
«Le pouvoir des autorités américaines, c’est de nous imposer une taxe. En vertu des ententes commerciales, ils ne peuvent pas instaurer de quotas, mais c’est ce que veulent les producteurs américains dans une entente future», a indiqué André Tremblay, PDG du Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ), sur le réseau TVA.
«Si on nous impose une taxe, c’est sûr qu’on tombe en déficit. Nos membres émergent d’une période difficile. Ils commencent à peine à se sortir la tête de l’eau. Il n’y a pas une seule scierie au Québec qui peut supporter une taxe de 25 % tout en restant rentable. C’est impossible, même pour les plus grosses», a poursuivi M. Tremblay.
Par exemple, pour produire 1 000 pmp, il en coûte présentement 325 $, plus 50 $ pour l’expédier, ce qui laisse environ 25 $ de profit aux producteurs. Les charges d’exploitation supplémentaires seront de l’ordre de 250 M $.
Rappelons que les deux pays avaient fait le choix de prolonger les pourparlers à la suite de l’échéance de l’Accord sur le bois d’œuvre résineux, le 12 octobre 2015.
Les gouvernements américain et canadien ont indiqué vouloir poursuivre les négociations malgré l’échéance du moratoire.
L’Union des municipalités du Québec inquiète
L’économie de 220 municipalités québécoises dépend du secteur forestier, a rappelé l’Union des municipalités du Québec (UMQ).
Cette dernière s’inquiète qu’un nouveau conflit frappe le commerce canado-américain de bois d’oeuvre.
« L’industrie [forestière] génère près de 6 0 000 emplois directs sur l’ensemble du territoire, dans toutes les régions du Québec », dit encore l’UMQ.
Selon le vice-président de l’UMQ, Alexandre Cusson, le Québec présente des « spécificités forestières » dont les négociateurs canadiens doivent tenir compte. M. Cusson demande que, dans le cadre d’un éventuel accord, le Québec bénéficie d’une exemption. Le vice-président de l’UMQ justifie cette demande par le fait que le régime forestier du Québec « répond adéquatement aux règles d’un libre marché demandé par les Américains ».