Chiffrer le manque à gagner de dix journées de grève dans l’industrie de la construction est la question que m’ont le plus souvent posé les journalistes.
La réponse facile aurait été de répondre par une autre question: « Demandez-moi plutôt si ce conflit a fait des gagnants et je vous répondrai sans hésitation: non! »
On ne vit pas dans un drôle de monde, mais dans deux mondes. Le syndical et le non-syndical, et un énorme fossé, plus grand que jamais, sépare les deux univers.
Le premier revendique des droits acquis, acquis parce qu’obtenus en vertu d’une ancienne convention, intouchables comme les vaches en Inde. Le rapport de force a pris le pas sur les relations de travail. Ah! le poids de la tradition. Celui de l’inertie aussi est parfois lourd.
Le second ne revendique pas, il travaille ou tente de travailler. Certes, il demande les meilleures conditions possibles et peut tenter sa chance pour un autre employeur afin d’améliorer son sort. C’est le jeu sain de l’offre et la demande. Généralement pas plus con, le patron prendra les dispositions pour conserver les éléments sur qui il veut compter et ne cherchera jamais à provoquer un roulement intempestif de son personnel. Si bien que tout finit par s’équilibrer dans une telle relation.
Les travailleurs, leurs entreprises, par à-coup nos magasins, personne n’aurait eu de manque à gagner si on était en relation plutôt qu’en confrontation.
Et la réponse à la question, quelle est-elle déjà?
Elle se détaille en gros comme suit.
Les centres de rénovation orientés clients professionnels ont définitivement été les grands perdants. Et leurs pertes vont continuer car les entrepreneurs généraux et spécialisés doivent éponger leur propre manque à gagner. Quelques jours s’écouleront lentement avant que la roue recommence à tourner au régime attendu.
Les fabricants et distributeurs de matériaux et d’outillage pro commençaient à s’inquiéter du conflit qui s’enlisait. Rares sont ceux qui ont procédé à des mises à pied, mais ça s’en venait. Une semaine de plus et les avis au personnel partaient. Ouf! il était moins une.
Je parle évidemment du marché résidentiel qui fait travailler, en gros, les membres de l’APCHQ, gros clients de nos magasins. Pour les autres qui fabriquent pour le secteur Industriel, Commercial et Institutionnel (ICI), le bras de fer se continue hélas. La tolérance financière et psychologique des patrons d’usines approche de son étirement maximal…
Les quincailleries servant plutôt les consommateurs s’en sortent bien. Le « do-it-yourself » est resté actif. Celui qui était moins manuel l’est peut-être devenu par la force des choses; nos magasins étaient là pour l’accompagner.
Les fournisseurs de lignes pour consommateurs n’ont sans doute pas écopé.
Bref, malgré l’humidité, on respire mieux à l’AQMAT et chez la plupart de nos membres. Mais pas tous. Alors, pensons à eux.