Consommation plus responsable : les citoyens attendent davantage des marques et des détaillants

En matière de consommation responsable, les Québécois sont conscients de leur part, mais veulent être appuyés, principalement par les marques et les marchands. C’est ce qu’a révélé l’Observatoire rattaché à l’UQAM avec la dixième édition de son Baromètre de la consommation responsable dévoilée hier, ironiquement en cette semaine du « Black Friday » qui vise au contraire à encourager la surconsommation.

L’offre de produits dits écoresponsables (par exemple, des produits conçus pour durer exposant une chaîne d’approvisionnement transparente, moins emballés, etc.) est jugée en croissance, mais insuffisante aux yeux de cette frange croissante de consommateurs qui ne se satisfont plus du statu quo.

Par exemple, 57,4 % disent avoir privilégié l’achat d’un produit justement parce qu’il était peu emballé ou 62,1 % ont choisi de ne pas remplacer un objet qui fonctionnait encore.

Aux yeux des répondants, une entreprise est qualifiée de reponsable en 2019 si :

  • elle protège la santé des consommateurs (91,4 %);
  • elle protège la sécurité des consommateurs (90,9 %);
  • elle respecte les lois en vigueur (90,5 %);
  • elle possède un code d’éthique (88,1 %);
  • elle rend ses pratiques commerciales plus respectueuses de l’environnement (86,8 %);
  • elle s’implique auprès de la communauté (81,3 %);
  • elle soutien des activités commerciales et culturelles dans les régions où elle opère (78,5 %).

Au palmarès des entreprises les plus responsables depuis 10 ans, Cascades se classe à la fois comme l’organisation et la marque perçue la plus responsable.

Si 68 % des répondants apportent leurs propres sacs à l’épicerie, 36 % font pareil lorsqu’ils achètent dans d’autres types de commerces. D’ailleurs, c’est dans une proportion de trois sur quatre que les Québécois, selon ce sondage, sont favorables à l’élimination des sacs de plastique dans tous les commerces, même que 61 % voudraient que le gouvernement bannisse carrément l’utilisation de sacs en plastique.

Quand on y pense, plusieurs comportements qualifiés d’écogestes n’existaient pas en 2010 quand. Ils sont devenus courants de nos jours. Fabien Durif, directeur de l’Observatoire de la consommation responsable (OCR) de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, donne en exemple l’utilisation d’une bouteille d’eau réutilisable ou le refus des sacs de plastique en magasin pour illustrer à quelle vitesse les citoyens changent.

On apprend dans ce nouveau Baromètre que certains comportements alternatifs, telle la consommation collaborative, sont en forte progression. Cependant, les auteurs notent qu’à l’exception du compostage (dont la pratique est passée de 28 % à 38 % depuis 2010), la proportion de citoyens qui pratiquent intensément la consommation responsable n’a pas augmenté de manière significative au cours de la dernière décennie. Un seul comportement s’est implanté solidement dans les habitudes: le recyclage.

Après avoir pris connaissance de la dernière étude, Richard Darveau réfère à un réveil brutal : « On se rend compte que le fantasme de la consommation sans plafond a moins sa place, comme si la population prenait conscience du lien étroit qui existe entre notre système basé sur l’accumulation de biens matériels et l’état de santé de la planète et de ses habitants ».

Autres faits saillants

Popularité perceptible du « zéro déchet » : les Québécois utilisent de plus en plus de contenants réutilisables et limitent l’achat de produits générant des déchets superflus

Diminution des aliments à base de protéines animales :

  • Une personne sur deux a réduit sa consommation de viande dans la dernière année
  • 44 % ont réduit la consommation de viande en la remplaçant par autre chose, essentiellement des fruits, des légumes et des légumineuses;
  • 47 % ont essayé dans la dernière année des substituts de viande (50 % les ont achetés à l’épicerie, Yves étant la marque la plus populaire devant Beyond Meat);
  • 30 % les ont expérimentés au restaurant: A&W est la chaîne la plus populaire à cet égard.

Attrait des véhicules écologiques : 34 % des répondants considèrent « très certainement » ou « certainement » l’achat d’un véhicule électrique ou hybride/hybride rechargeable, mais une partie importante est encore peu décidée sur le type de modèle.

À l’exception du compostage, dont la pratique est passée de 28 % à 38 % depuis 2010, un seul comportement s’est implanté solidement dans les habitudes: le recyclage.

L’étude a été menée auprès de résidents de l’ensemble de la province du Québec âgés de 18 ans et plus. De cette population, un échantillon aléatoire de 1002 personnes a été tiré à partir du panel de 34000 internautes, soit un panel représentatif de la population. Le questionnaire a été élaboré par les chercheurs de l’OCR. La durée moyenne nécessaire pour remplir le questionnaire a été de 20 minutes. La collecte de données officielle a été réalisée du 23 septembre au 8 octobre 2019.

On peut consulter tous les résultats du Baromètre de la consommation responsable 2019.

Les citoyens attendent d’eux-mêmes et veulent faire leur part, mais ils sont 87,9 % et 83,9 % à attendre des gestes concrets de la part des marques qu’ils aiment et des détaillants qu’ils fréquentent.

 

Constat semblable en Europe

Pendant ce temps, mi-septembre, une étude semblable a été dévoilée en France, appelée le baromètre GreenFlex de la consommation responsable.

Créée en 2004, l’étude interroge en profondeur la manière dont les Français et les Européens vivent leur consommation et leur rapport à la société.

La conclusion de l’édition 2019 est sans appel : le modèle de société actuel est à bout de souffle :

  • 60 % des Français se disent inquiets de l’état de la planète et pensent qu’il est urgent d’agir;
  • 86 % aimeraient vivre demain dans une société où la consommation prend moins de place.

Pour la première fois, plus d’un Français sur deux (57 %) estime qu’il faut « complètement revoir notre système économique et sortir du mythe de la croissance infinie », loin devant le fait d’améliorer l’existant.

La « consommation responsable » est centrale mais critiquée : 67 % des Français disent avoir changé certaines de leurs pratiques et 13 % déclarent faire tout leur possible pour réduire l’impact de leur consommation. Cela passe notamment par un engouement croissant pour les produits « durables »: bios, locaux, naturels, sans parabènes ou conservateurs…

Toutefois, le bio n’est plus perçu comme la solution magique : 8 Français sur 10 (82 %) déclarent que les « produits bio ne se valent pas tous ». Ils sont même 84 % à préférer acheter des fruits/légumes locaux et de saison que des fruits/légumes bio qui viennent d’un autre pays.

La simplicité volontaire fait aussi son chemin. Nos cousins du vieux continent ont conscience que la consommation de produits durables ne suffit plus (-15 points depuis 2017) et qu’il faudrait réduire sa consommation en général (+13 points).

Le phénomène de la lutte au superflu émerge déjà dans leurs habitudes d’achats. À titre d’exemple, dans le secteur des produits cosmétiques et d’hygiène, plus de 2 consommateurs sur 3 (70 %) disent acheter moins de produits.

D’autres formes d’engagement, hors de la consommation, se développent, comme soutenir l’emploi local et s’investir dans son territoire.

Les Français désirent également avoir un métier qui a plus de sens (59 %, soit plus d’un actif sur 2).

Les entreprises françaises sont attendues au tournant. Si les États sont perçus par les Français comme l’acteur numéro 1 du changement, c’est qu’ils ont une vision négative des entreprises et des marques; seuls 27 % des Français leur font confiance, soit 31 points perdus depuis 2004.

Pourquoi? Parce que selon les Français, les entreprises/marques incitent à la surconsommation et nous poussent, par exemple, à renouveler sans cesse notre garde-robe (91 %) ou nos appareils électroniques (92 %).

Les résultats obtenus à l’échelle européenne (Espagne, Italie, Royaume-Uni, Allemagne, Suède) confirment et renforcent la nécessité pour les entreprises de prendre le sujet à bras le corps :

Le constat d’une société (de consommation) à bout de souffle est partagé par tous les pays sans exception.

Le plastique émerge derrière le climat comme le nouveau symbole des dérives d’un système dont les Européens ne veulent plus.

Pour les signataires de l’Étude, « L’envie d’agir est partout présente, bien qu’elle revête assez logiquement des formes différentes dans chaque pays ». Si tous se posent en acteurs du « consommer mieux », la France, selon les auteurs, émerge comme l’exception européenne sur le « consommer moins » et le « faire autrement ».

 

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