Le blog de Richard


Le bois fédérateur

Dernier à prendre la parole mardi soir devant toutes les grosses pointures politiques et économiques de la Côte-de-Beaupré et de l’Ile d’Orléans, j’ai pu me rendre compte à quel point le bois, une année après la création de la Coalition BOIS Québec, était devenu rassembleur. Toute couleur politique, écolos comme gens d’affaires, le monde s’est rallié derrière l’idée de redonner à ce matériau sa juste place.

C’était beau à voir et à entendre, parce que rare, l’unisson avec lequel la chef de l’Opposition officielle autant que les députés du parti au pouvoir à Québec ainsi que les députés des formations fédérales, sans oublier les maires et préfets des deux régions limitrophes, les présidents des deux chambres de commerce et les responsables de la défense de l’environnement, tous étaient unanimes à célébrer les vertus de la matière ligneuse.

Chacun, cependant, y allait de son argument propre, en fonction de ses intérêts ou de ceux de ses commettants. Qui de l’importance d’aider nos travailleurs de la forêt ou des produits transformés, qui de la contribution de l’arbre, même devenu du bois de démolition, à la lutte aux gaz à effet de serre, qui de l’apport du bois à notre qualité de vie pour ses propriétés esthétiques ou acoustiques.

Coiffant une longue série d’allocutions, il m’a fallu porter à la fois mon chapeau de représentant de l’industrie de la quincaillerie et des matériaux de construction et celui de vice-président de la Coalition pour exposer à toutes ces bonnes gens que somme toute, il nous faut maintenant prouver que l’usage du bois est rentable si on veut que le propriétaire résidentiel, l’entrepreneur professionnel en construction de maisons, l’architecte, le fonctionnaire chargé de chantiers institutionnels puissent passer de la belle parole à l’acte.

Rentable à long terme, bien sûr, car la durabilité et le « fait au Québec » ont leur prix pour les acquérir…


L’affaire du bois

La Coalition BOIS Québec a un an. Ça fait moins la manchette que l’affaire (Claude) Dubois, débité à la hache par la critique et les téléspectateurs. Ca fait moins de bruit aussi que le départ de Guy Chevrette de la direction du Conseil de l’industrie forestière du Québec (CIFQ). N’empêche, le boulot de communication de masse qu’abat l’organisme, maintenant enrichi de semences de démarchage sur le terrain, donne déjà de prometteuses fleurs : Ultramar et Tim Horton ont été les premières chaînes marchandes à s’engager à privilégier le bois pour les structures de leurs prochains établissements au Québec. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’une de nos bannières de centres de rénovation emboîte le pas…

L’approche de la Coalition se situe aux antipodes de la télé-réalité de Dubois ou de l’emporte-pièce qui a caractérisé le style de monsieur Chevrette au nom de l’industrie forestière. Les deux contribuent pour rien au réchauffement climatique. A contrario, la Coalition, fruit consensuel, affiche des qualités semblables à la gestion de nos forêts aujourd’hui, qui tranche tant avec les coupes à blanc du 20e siècle, aussi puissantes que destructrices…

La Coalition travaille dans la durée. En cela, elle représente un atout maître dans la lutte aux gaz à effet de serre. La ministre Nathalie Normandeau l’a compris en prenant le siège du pilote de la Stratégie d’utilisation du bois dans la construction au Québec.

Avec l’arrivée de Me André Tremblay au CIFQ, on peut croire que papetières et grandes scieries, ces nécessaires partenaires, occuperont la place qui leur revient au sein de la grande Coalition BOIS.



Provoquer autrement

Déjà un triste anniversaire, le 11 septembre a rallumé les passions avec l’intention d’un pasteur américain de brûler des exemplaires du Coran. Cela alors que les musulmans célébraient la rupture du ramadan, leur jeûne.

La violence qui engendre la violence serait donc un proverbe fondé. Échafaudé en fait sur de l’information nivelée au plus bas et véhiculée grossièrement des deux côtés. Les musulmans deviennent ainsi tous des terroristes, les Américains, eux, des esprits obtus. Des extrêmes dépeints unidimensionnellement.

Extrapolons sur le thème de la provocation pour verser dans la discrimination, cette fois, positive.

L’AQMAT vient d’embaucher une musulmane. Par conviction, elle porte le voile. En faveur de l’ouverture culturelle, notre organisation veut s’inscrire dans le mouvement contraire à celui de l’intolérance, dominé par une culture de la peur.

Et si l’ignorance et le manque de dialogue étaient plus menaçants pour notre sécurité et notre prospérité que notre emprisonnement dans des clichés?…

Le parcours de Bouchra − qui a choisi le Québec il y a deux mois − est miné d’avance. Elle sentira la résistance, la sienne comme celle de toute la société. L’échec en tout cas est inexorablement évité parce que, quoi qu’il arrive de sa présence à l’Association, l’essai en soi, de part et d’autre, réduit déjà le fossé entre ce qu’elle transporte comme valeurs et les nôtres.


Le monstre apprivoisé

Le 27 août, on a battu des records de chaleur. Pas dehors, dedans. Dans les salles de négo. C’était le jour où tout le Québec a lancé un grand « ouf! » de soulagement. Une entente de principe venait d’intervenir entre les parties patronale et syndicale du vaste monde de la construction, incluant le secteur résidentiel.

Maintenant, on se croise les doigts pour que le message descende positivement jusqu’aux bases des cinq associations syndicales constituant l’Alliance, laquelle recommande la ratification de l’accord afin qu’une convention triennale, échue depuis le 30 avril, entre en vigueur à partir du 31 octobre.

Si les chantiers résidentiels avaient été paralysés, on aurait tous écopé. Alors réjouissons-nous du miracle.

Je pèse mon mot à odeur de magie parce qu’à y réfléchir un peu, quelle bête tentaculaire que cette industrie à maîtriser! Presque 85 % des entreprises qui la composent ont moins de cinq salariés. Ceux-ci doivent être mobiles plus que tout autre travailleur, et non seulement les chantiers ont toujours une durée limitée, ils surviennent inégalement dans l’année, se concentrant sur les mois doux. La pire difficulté tient sans doute au fait que les chantiers de réno se réalisent dans des environnements vivants, où tout bouge et interagit : résidents, automobilistes, patients, élèves, etc.

Ce n’est pas une industrie comme les autres non plus parce que les travailleurs sont tous syndiqués, fait unique, complexifié par une concurrence parfois féroce entre cinq centrales. Leurs vis-à-vis patronaux n’affichent pas un front plus simple puisqu’ils sont quatre, soit l’ACQ et l’APCHQ, en plus de l’Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec et l’Association des entrepreneurs en construction du Québec.

Je salue les uns et les autres qui ont eu la brillante idée de s’unir pour ne former que deux blocs, chacun représenté par un seul porte-parole. La présidente du conseil d’administration de l’AQMAT parle ce mois-ci dans le magazine Quart de Rond de la solidarité qui peut conduire à de grands résultats. En voilà une belle démonstration.


Avocasseries et tabous

Maître Bastarache, sur son arbre perché, malgré l’armada à sa disposition et la carte de crédibilité qui le précède, doit manœuvrer tout en courbes et en nuances et en zigzags, déposant un jeté ici sur l’expression trop criarde « enquête sur l’industrie de la construction », censurant là où une allusion excéderait le strict examen de la nomination des juges.

Maître Bellemare, déchiré entre une nature de justicier populaire et la peur raisonnable d’être attaqué pour diffamation et finir dans le box, use de bémols, s’astreint à un flegme frisant l’emprunt quand on connaît son caractère, histoire de conjurer la portée de ses demi-affirmations.

Nous, non-avocats, en serons quittes pour assister à la victoire de la technique et de la procédure. Pour la vérité vraie, on repassera.

N’empêche, l’exercice n’aura pas été futile. Car si tant est que le politique n’aurait pas respecté la sacro-sainte règle de la séparation des pouvoirs élevée au statut d’intouchable depuis 1789 dans nos démocraties, les années à venir, peu importe le parti au pouvoir, couleront assainies.


Histoire sans fin

Après l’ode à l’effort la semaine dernière, où je vénérais l’art de cheminer plutôt que d’aboutir, le chagrin m’habitant presque depuis l’atteinte du sommet du Kilimandjaro, vécu comme une petite mort, voilà que je vire capot.

Depuis 3 h 58 et 4 h 10 ce matin, je suis grand-père. L’arrivée des jumeaux Édouard et Elliot vient redonner toute noblesse à l’idée de rendre un projet à terme. Ipso facto, la notion de destination devient belle. Souhaitée, même.

Concevoir, élaborer, avancer demeurent louables, de toute façon inévitables, pour qui veut accoucher. Mais qu’est-ce que la mise au monde sinon qu’une fin et un début?

J’ai donc erré, mon postulat étant faussé : toujours on arrive et tout le temps on repart.


Quand la montagne ne vient pas à soi…

Atteindre le sommet du Kilimandjaro, comme je l’ai fait ce 30 juillet, est satisfaisant, certes. Pas plus cependant que le parcours de six jours pour s’y rendre. À moins d’être seulement motivé par la fin des choses.

Des heures et des jours, même une nuit, à ne faire que monter et monter encore cette accessible  mais toujours repoussée cime finit par devenir une activité qui se confond avec le but.

Jamais je n’ai ressenti autant de satisfaction à vivre le moment présent que lors de lascension constante de la « Montagne de Dieu »  au sens swahili du mot « kilimandjaro ». Marche rarement dérangée par des efforts ou des risques démesurés. Cadre favorable à lintrospection. Impression forte que cest la montagne qui vient à soi.

Plus la pente saccentue, plus le mercure, lui, descend. La barre des 20 000 pieds daltitude s’approche au rythme en escalade des tempes proches du bouton « panique ». La dernière nuit de montée restera celle où les ressources sont toutes sollicitées. On est alors heureux de ne pas voir au-delà du rayon d’un mètre de la lampe frontale parce que les silhouettes aperçues font deviner des marcheurs zombies ou saignant du nez ou des oreilles.

Arrive la libération avec les premiers jets du nouveau jour. Le glacier jure sur l’Afrique noire. Je devrais me sentir bien, délivré. Je le suis. En même temps, la perte de l’effort obligé, du travail de galérien, me chagrine. Je m’en ennuie déjà, j’y étais habitué.

Sisyphe aura été un mythe et j’y aurai cru. Une semaine. Éternelle.


Le plein et le vide

Rendus au 15 juillet, on est tous déjà plus ou moins en vacances. La tête cherche à faire le vide, le corps veut faire le plein. Ou le contraire, selon ce qu’on fera du congé.

Quelques pensées légères sur le plein et le vide et les vacances… en attendant le retour de l’Xpress, le jeudi 12 août.

Je pensais que les vacances me videraient la tête. Mais non, les vacances, ça ne vide qu’une chose : le porte-monnaie.
− Jean-Philippe Blondel

Rien de tel que des vacances ratées pour vous réconcilier avec une vie de labeur.
− Arnold Bennett

Si l’on faisait tout ce que l’on doit vraiment faire avant de partir en vacances, elles seraient terminées sans même avoir commencé.
− Beryl Pfizer

Le meilleur moyen d’enrayer l’hémorragie des accidents de travail est sans doute d’arrêter de travailler. Ce qui aurait malheureusement pour conséquence d’augmenter les accidents de vacances.
− Coluche

Je ne verrai jamais les Jardins suspendus de Babylone, mais ce qui me réconforte, c’est que personne d’autre non plus.
− Geoff Nicholson


Sang-froid pour sujet chaud

« Le monde est fou », chantait Beau Dommage. J’apporte dans mes bagages, à destination du continent africain, mitaines, pantalons, chaussettes et même sous-vêtements en Gore-Tex et, d’ici là, je dors pratiquement sur ma terrasse tellement la chaleur se fait accablante.

Même que l’agence avec laquelle je transige en Tanzanie pense que je me fous d’elle avec mes 40 degrés au pays de l’esquimau.

Le plus ridicule de l’affaire, c’est l’entraînement. Nous sommes quinze personnes à se mesurer au Kilimandjaro, plus haute montagne seule au monde* et unique toit enneigé de l’Afrique. On tente de reconstituer le plus possible les conditions qu’on vivra : journées entières à monter (ou à descendre) avec de bonnes charges et vêtus de manière à affronter le froid appréhendé, la nuit encore plus que le jour.

Allez courir, vous, ces jours-ci, au Québec, avec polar, bottes d’hiver aux pattes et douze kilos dans le sac à dos, vous m’en donnerez des nouvelles! Et que dire de tenter de dormir en camping dans un sac de type momie; juste la chandelle achetée pour enlever l’humidité dégagera trop de chaleur pour ne pas vous énerver!

Le monde est fou, donc, et les temps sont durs. Je ne parle pas des paragraphes d’avant, de ceux qui suivent.

La prostitution est une condition extrême de survie. Elle ne constitue un destin ni enviable ni souhaitable. C’est pourquoi plusieurs des femmes qui la pratiquent tentent d’en sortir.

L’ascension du Kilimandjaro n’est en fait qu’un prétexte pour financer la Maison de Marthe, organisme de bienfaisance palliant à l’absence de tout programme gouvernemental pour aider les femmes à s’extirper de la prostitution et de la spirale de drogue et de violence qui les garde prisonnières.

Menée par Rose Dufour, docteur en anthropologie de la santé et auteure d’un livre de référence sur le phénomène social de la prostitution, la Maison de Marthe a développé une démarche d’intervention novatrice basée sur trois concepts clés qui consistent à mobiliser les prostituées en elles et entre elles, et à faire de même avec la collectivité. Une approche où l’obligé sang-froid scientifique côtoie la passion pour la vie, la vie digne.

Nous sommes donc un groupe hétérogène par notre âge (de 17 à 60 ans) et tant d’autres différences, mais uni par la volonté de donner au mot humanité quelque lettre noble, et qui troquera, le 20 juillet, la chaleur du Québec pour le froid africain.

Dernière condition à remplir, hormis de poursuivre un entraînement intense : boucler le budget pour financer la cause.

Pour me soutenir, visitez mon mini site Web, http://www.rouletaboule.org/. Les sommes recueillies serviront principalement à accompagner les femmes, ce qui inclut souvent une désintoxication de première ligne, diverses thérapies, un aide à la survie et à la réinsertion sociale, scolaire et professionnelle.

P.-S. : Photo prise le week-end dernier dans la fraîcheur de la vallée de la Jacques-Cartier pour un dernier entraînement en groupe.

*L’Everest fait partie de la chaîne de l’Himalaya alors que l’Aconcagua en Argentine, de celle des Andes.


Devant l’adversité, toujours agir

Il était une fois un rat dont on s’amusait à électrifier la moitié du plancher de sa cage, l’obligeant à trouver un peu de paix et de souffle sur l’autre moitié du plancher. Et le manège de continuer des heures, des jours.

Le même rat vit l’arrivée d’un congénère et, avec lui, l’électrification cette fois de tout le plancher de la cage. Il se mit automatiquement à cogner sur l’arrivant, sans arrêt, du moins tant que le courant passait sous ses pattes.

Pauvre bête, voilà qu’elle perd son ami-émissaire et qu’en même temps le plancher s’électrise au complet et régulièrement, sans possibilité de se réfugier, et plus moyen d’agresser l’autre, ne serait-ce que pour se libérer d’un trop-plein.

Au long des trois épisodes, les tests ont montré que c’est seulement lorsque notre rat subissait le plancher totalement électrifié, sans pouvoir ni fuir ni combattre, que son niveau de stress augmentait et l’usait.

L’expérience aux allures de fable diabolique était en fait scientifique, menée par le docteur Hans Selye. Elle a prouvé qu’il faut manager sa santé en esquivant et en se battant, mais jamais en endurant.

Or, il en va d’une société et d’une organisation comme d’un individu ou d’un rat. L’une de nos entreprises membres, dont je tairai le nom, doit actuellement gérer un important rappel de produits défectueux, et elle le fait en y consacrant du temps de qualité et beaucoup d’argent, engageant ses fournisseurs, muée par l’espoir de conserver la relation avec les clients actuellement pénalisés.

Cela n’arrivera pas. La relation client ne sera pas conservée, elle sera renforcée. Car le client accepte l’erreur quand elle est matée, accompagnée d’excuses et d’un bon programme de compensation, et voit dans le geste quelque chose d’honorable.

Tomber est bien, cela permet de se relever.

Contre-exemple, la gestion passive de la crise telle qu’exercée par le président Obama devant la marée noire montante est mal perçue. Il doit attaquer ou s’en laver les mains, pas de place pour une position à mi-chemin.

La crise est un processus de transformation. Sa gestion suppose que l’organisation ou l’individu qui traite avec un événement menaçant de lui nuire doit agir, et vite. De deux choses l’une : il contourne l’obstacle lorsque possible, sinon il se bat.

Autour de moi, autour de vous aussi, forcément, il y a des gens et des entreprises aux prises avec des enjeux devant lesquels la tendance naturelle est de croire au temps réparateur ou à l’oubli. Chômage, santé, contrat litigieux, autant de défis qu’il leur faudra affronter par l’action, quelle qu’elle soit. Je leur souhaite le courage nécessaire.