
La politique étant ce qu’elle est, trop souvent à court terme et concentrée sur ce qui paraît bien, on se rend compte que plusieurs municipalités ont négligé de concevoir leur gestion des eaux (égouts et aqueducs) en pendant aux besoins futurs. Résultat : nombre de projets de construction de maisons et de logements sont ralentis, voire freinés, par les limites atteintes de ces infrastructures.
Tous les observateurs de ce mauvais film ont les yeux rivés sur Eric Girard, le ministre des Finances qui dévoilera bientôt son budget, avec un espoir nourri d’aider les villes et municipalités à se doter des argents et de l’expertise pour faire face à la nouvelle situation démographique.
Dois-je vraiment rappeler que le Québec fait face à une crise du logement sans précédent et que sa résolution passe, entre autres, par la nécessité de densifier les centres-villes et les noyaux villageois, une approche qui répond à la fois à la demande croissante en logements et à la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre (GES) générés par les transports inutiles?
En effet, l’étalement urbain, caractérisé par la progression des surfaces urbanisées à la périphérie des villes, entraîne une dépendance accrue à l’automobile, augmentant ainsi les émissions de GES. Pour contrer ce phénomène, la densification urbaine apparaît comme une solution viable. Elle permet de limiter les coûts de fonctionnement et d’entretien des réseaux que supportent les collectivités locales et participe à la transition écologique.
Autrement dit, plus d’usagers à desservir sur moins de kilomètres est plus économique que moins d’usagers sur plus de kilomètres. Simple, non?
L’impact des infrastructures défaillantes sur le développement résidentiel
Plusieurs municipalités québécoises sont confrontées à des infrastructures vieillissantes qui freinent le développement résidentiel.
Par exemple, la ville de Sept-Îles a connu une crise du logement dans les années 1960 en raison de la pression exercée par le boom industriel sur les infrastructures existantes. Le manque de logements a conduit à la prolifération de maisons mobiles installées sans services municipaux adéquats, reflétant une incapacité à répondre à la demande en raison de l’insuffisance des infrastructures.
De même, des villes comme Granby, Marieville, Rimouski, Drummondville, Rouyn-Noranda et Saint-Georges affichent des taux d’inoccupation extrêmement bas, variant entre 0,1 % et 0,3 %. Cette pénurie de logements est en partie attribuable à des infrastructures municipales insuffisantes pour soutenir de nouveaux développements résidentiels.
Cependant, la densification nécessite des infrastructures robustes.
Des réseaux d’égouts et d’aqueducs en mauvais état peuvent compromettre la viabilité de projets de densification, limitant ainsi les efforts pour réduire l’étalement urbain et les émissions associées.
La modernisation des infrastructures municipales requiert des investissements massifs que de nombreuses municipalités peinent à assumer. Les coûts élevés de réfection des réseaux d’égouts et d’aqueducs, combinés à des budgets municipaux limités, retardent souvent les projets de développement résidentiel.
De plus, la complexité des processus bureaucratiques et la lenteur des décisions politiques peuvent freiner la mise en œuvre de ces projets.
Des solutions innovantes pour un avenir durable
Face à ces défis, certaines municipalités adoptent des approches innovantes.
Par exemple, le Technopôle Angus à Montréal est un écoquartier en cours de construction intégrant une boucle énergétique entre le secteur industriel et résidentiel, optimisant ainsi l’utilisation de l’énergie et réduisant la pression sur les infrastructures existantes.
De plus, des initiatives de densification douce, telles que l’ajout d’étages à des immeubles existants ou la transformation de maisons unifamiliales en logements multifamiliaux, permettent d’augmenter la densité sans nécessiter de nouvelles infrastructures majeures.
Conclusion
La crise du logement au Québec, déjà conditionnée à la disponibilité des travailleurs et aux coûts croissant de cette main-d’œuvre, en plus de la guerre (inutile) des tarifs qui compliquent les choses, se trouve intrinsèquement liée à l’état des infrastructures municipales.
Or, le Plan québécois des infrastructures (PQI) 2025-2035 actuel ne prévoit que 7,1 milliards de dollars d’aide aux municipalités sur dix ans. Ceci peut maintenir les actifs, mais il ne permet pas de développer.
Certains observateurs réclament que ce montant soit triplé afin de mettre aux normes quantité de stations d’épuration et autres travaux pour éliminer des rejets d’eaux usées municipales, actions devenues illégales.