La Banque du Canada a finalement cédé à la pression des marchés en annonçant une première baisse de son taux directeur en 2025, suite logique de ses décisions qui ont ponctué l’année dernière. Une décision attendue, qui devrait alléger quelque peu le fardeau des emprunteurs, notamment ceux aux prises avec des prêts hypothécaires à taux variable.
Pourtant, cette inflexion monétaire ne suffira pas à résoudre le problème sous-jacent qui ronge le pays : une pénurie chronique de logements qui continue de s’aggraver, si on en croit les dernières statistiques de mises en chantier.
En effet, En 2024, le nombre réel de mises en chantier d’habitations a augmenté d’un maigre deux pourcent dans les centres d’au moins 10 000 habitants au Canada : 227 697 logements ont été commencés, contre 223 513 en 2023.
C’est donc dire que, malgré des initiatives ci et là des gouvernements et des municipalités, le nombre de nouvelles constructions demeure largement insuffisant par rapport aux besoins; le retard s’accumule et les conséquences sociales et économiques se font sentir.
Certes, la baisse du taux directeur est une bonne nouvelle pour les promoteurs immobiliers, qui voient ainsi une réduction du coût du financement de leurs projets. Cependant, cet effet ne se traduira pas immédiatement par un boom de la construction. Le secteur fait face à des obstacles structurels bien plus profonds : si les coûts des matériaux sont relativement sous contrôle pour le moment, ceux de la main-d’œuvre qualifiée devraient grimper en flèche si on lit entre les lignes des négociations qui ont cours entre les parties syndicales et patronales : on parle d’augmentations de 18 % pour la première année de la nouvelle convention collective!
Au banc des accusés se retrouvent aussi les délais interminables d’approbation municipale et la jungle des versions de codes de construction appliqués par les villes et municipalités qui compliquent la vie des entrepreneurs.
Bref, la série de baisses des taux d’intérêt ne fait pas le poids devant d’autres freins que je qualifierais de plus systémiques.
S’ajoute un autre facteur qui pèse sur la crise du logement : la hausse record des loyers autorisée en 2025 par le Tribunal administratif du logement (TAL) : 5,9 %, un taux dépassant largement l’inflation qui met une pression supplémentaire sur les locataires déjà fragilisés par la rareté des logements abordables.
Nombre de Canadiens peinent à se loger à des prix raisonnables. L’offre restreinte maintient les coûts à des niveaux inaccessibles pour une grande partie de la population. Les jeunes travailleurs, les familles monoparentales et les nouveaux arrivants sont les premières victimes de cette crise qui sape la croissance économique et exacerbe les inégalités sociales.
Les gouvernements doivent agir de manière plus audacieuse. Des incitatifs fiscaux accrus pour la construction de logements abordables, des réformes visant à accélérer les permis de construction et une stratégie nationale pour former et attirer davantage de travailleurs dans le secteur sont essentiels. Il est illusoire de croire qu’un simple ajustement monétaire réglera un problème d’une telle ampleur.