Au nom des familles en entreprise, Richard Darveau demande au ministre Morneau de reporter sa réforme fiscale d’un an

Le gouvernement du Canada fait fi de la position de 80 associations patronales et du comité sénatorial des finances. Par son ministre Bill Morneau, il maintient la date d’application d’une réforme fiscale devant affecter les petits entrepreneurs au 1er janvier. Ce que dénonce Richard Darveau au nom des membres de l’AQMAT.

Dans sa lettre adressée ce matin au ministre fédéral des Finances, le président et chef de la direction de l’AQMAT affirme ne pas comprendre pourquoi M. Morneau s’entête à imposer une réforme aux entreprises familiales, dans sept petits jours ouvrables, sans avoir pris du temps de qualité pour en peser les effets.

« Nous sommes déçus et inquiets que le gouvernement du Canada aille de l’avant sans avoir procédé et communiqué un examen approfondi et indépendant du régime fiscal en vigueur au Canada », écrit M. Darveau qui rappelle que le but visé est tellement noble, celui de réduire la complexité des procédures fiscales, d’en assurer la compétitivité économique et d’en améliorer l’équité globale, qu’il doute que les mesures précipitées atteignent les résultats souhaités.

Puisque le ministre semble malgré tout déterminé, in extremis, l’AQMAT supplie le gouvernement de retarder au moins jusqu’au 1er janvier 2019 la mise en œuvre des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu en ce qui concerne les sociétés privées sous contrôle canadien.

« Une année complète nous permettrait de prendre connaissance de l’avant-projet de loi alors que le gouvernement pourrait mener des consultations pancanadiennes approfondies auprès des entreprises, des fiscalistes et des professionnels », soutient Richard Darveau qui dit souhaiter que soit alors rendue publique une analyse des répercussions économiques des propositions de la réforme Morneau.

Rappelons les faits.

En juillet 2017, le ministre des Finances a annoncé des propositions de modifications à l’impôt des sociétés et aux stratégies de planification fiscale qui y sont associées.

Sous l’égide de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, une Coalition s’est vite formée. L’AQMAT s’est joint, comme 80 autres associations patronales au fil des mois qui ont suivi.

Même si le ministre des Finances a modifié ses propositions en octobre 2017, ce que bon nombre de témoins ont qualifié de pas dans la bonne direction, plusieurs éléments demeurent problématiques.

Par exemple, les règles sur la répartition du revenu seraient compliquées à appliquer et exigeraient la préparation d’un nombre important de documents.

Qui plus est, la répartition du revenu serait assujettie à des décisions subjectives de vérificateurs de l’impôt, ce qui entraînerait inévitablement des incohérences et des litiges. Par ailleurs, elles ne permettraient pas la répartition légitime du revenu en fonction de la propriété conjointe implicite de biens familiaux.

La proposition relative au revenu passif se fonde sur une approche uniforme qui limiterait la croissance des petites entreprises et le fonctionnement normal des moyennes et grandes entreprises.

Elle encouragerait les propriétaires de sociétés à retirer des fonds de leur entreprise et créerait des inégalités de traitement par rapport aux règles fiscales qui s’appliquent aux sociétés publiques et aux entreprises sous contrôle étranger.

Si les médias ont surtout parlé de l’impact de la réforme sur les médecins et les agriculteurs, en fait, toute petite firme de services professionnels et par extension tout petit commerce familial, situation qui prévaut dans nombre de quincailleries, seraient aussi touchés.

Bon nombre de témoins ont dit craindre que les propositions nuisent à la compétitivité du Canada et entraînent des pertes en matière d’investissement et d’emploi. À tout le moins, les propositions ont suscité beaucoup d’incertitude dans la communauté des affaires, et des décisions en matière d’investissement ont été suspendues.

Pour ces raisons, l’AQMAT et plusieurs autres associations ont recommandé le retrait complet des modifications proposées. Le comité sénatorial permanent sur les finances nationales nous donne raison. Le sénateur André Pratte et les deux autres signataires d’un rapport rendu public le 13 décembre ne sont pas convaincus que le gouvernement a présenté ses propositions de manière convaincante. Ils estiment aussi qu’un examen indépendant et approfondi du régime fiscal est nécessaire pour veiller à ce qu’il ne soit pas excessivement complexe, qu’il préserve notre compétitivité économique et qu’il soit juste envers tous les Canadiens.

Tout le monde souhaite que le Canada se dote d’une stratégie pour s’assurer que son régime fiscal encourage, et non entrave, l’innovation, l’entrepreneuriat et la croissance économique. Or, le rapport du comité sénatorial conclue : « Une telle réforme, si elle n’est pas menée avec la prudence qui s’impose et en tenant dûment compte de ses possibles ramifications, risque de saper la confiance des citoyens et de perturber leur sens de l’équité. »

 

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