
Depuis son entrée en fonction pour un second mandat, le président américain Donald Trump se fait menaçant avec l’imposition de tarifs douaniers significatifs sur les importations en provenance du Canada. Officiellement, ces mesures, visent à répondre à des préoccupations liées à l’immigration illégale et au trafic de drogues quand, en réalité, elles ont pour but de rééquilibrer la balance commerciale américaine avec notre pays et son propre endettement.
En effet, au cours des deux dernières décennies, la dette publique des États-Unis et la balance commerciale avec le Canada ont connu des évolutions notables, reflétant des dynamiques économiques complexes et interdépendantes.
Évolution de la dette publique américaine (2005-2025)
En 2005, la dette publique des États-Unis représentait environ 61,3 % du produit intérieur brut (PIB). Cette proportion a augmenté progressivement, atteignant 67,7 % en 2008, en grande partie en raison des dépenses liées à la crise financière mondiale. La tendance s’est accentuée avec la crise des « subprimes », portant la dette à 82,4 % du PIB en 2009 et à 91,4 % en 2010.
La décennie suivante a vu une stabilisation relative, avec une dette oscillant autour de 100 % du PIB. Cependant, la pandémie de COVID-19 en 2020 a entraîné des mesures de relance massives, propulsant la dette à 126,3 % du PIB cette année-là.
En 2023, la dette publique américaine a atteint 122,3 % du PIB, reflétant les défis persistants liés aux dépenses publiques et aux recettes fiscales. Les projections pour 2025 suggèrent une poursuite de cette tendance, avec une dette avoisinant les 130 % du PIB, alimentée par des dépenses continues dans les infrastructures, la défense et les programmes sociaux.
« Que l’on aime le personnage ou non, Trump, en tout homme d’affaires qu’il est, est conscient du poids financier que traîne son pays et qui entrave son épanouissement », commente Richard Darveau, président de l’AQMAT.
Balance commerciale entre les États-Unis et le Canada (2005-2025)
Le commerce entre les États-Unis et le Canada est l’un des plus importants au monde, les deux pays étant des partenaires économiques majeurs. En 2005, les échanges bilatéraux de marchandises ont atteint des sommets, reflétant une intégration économique profonde.
Cependant, la période suivante a été marquée par des fluctuations. En 2016, les exportations du Canada vers les États-Unis ont atteint 394 milliards de dollars, tandis que les importations se sont chiffrées à 278 milliards de dollars, représentant respectivement 76,3 % des exportations totales du Canada et 52,2 % des importations.
Entre 2016 et 2020, les États-Unis ont enregistré un excédent commercial moyen d’environ 20 milliards de dollars américains avec le Canada. Fait à souligner, cette tendance s’est inversée au cours du second mandat du président Trump, avec un déficit commercial américain d’environ 45 milliards de dollars américains en 2024. C’est quand même ironique, non?
En 2023, les États-Unis représentaient 77 % des exportations canadiennes (594,5 milliards de dollars canadiens) et 49,6 % des importations canadiennes (373,7 milliards de dollars canadiens), soulignant l’importance continue de cette relation commerciale.
À ce sujet, soulignons que près de 50 %, soit autour de 170 milliards, des importations américaines sont issues de la filière énergétique : on parle ici de pétrole brut, de gaz naturel et d’électricité.
Les automobiles et pièces connexes représentent plus de 70 milliards des importations canadiennes vers les USA.
Les produits agricoles et alimentaires cumulent environ 40 milliards.
Près de 23 milliards de dollars sont envoyés en bois d’œuvre et en produits de bois d’ingénierie.
« Quand on soustrait le tout, analyse M. Darveau, on se rend compte que les produits manufacturés ne sont pas au cœur de la saga des tarifs. Certaines de nos PME manufacturières seront très affectées, mais pas autant que leurs homologues du bois brut, des fermes, de l’écosystème automobile ou des ressources naturelles. »
Mais revenons sur les fondamentaux.
Facteurs influençant ces évolutions
Plusieurs facteurs ont contribué aux évolutions de la dette publique américaine et de la balance commerciale avec le Canada :
- Crises économiques : Les crises financières, telles que celle de 2008, ont conduit à des augmentations significatives de la dette publique en raison des plans de relance et des baisses de recettes fiscales.
- Politiques budgétaires : Les choix politiques, notamment les réductions d’impôts et les augmentations des dépenses publiques, ont influencé la trajectoire de la dette.
- Accords commerciaux : Les accords comme l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et son successeur, l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), ont façonné les relations commerciales entre les deux pays.
- Fluctuations des devises : Les variations des taux de change ont affecté la compétitivité des exportations et des importations, influençant ainsi la balance commerciale.
Nature et portée des tarifs proposés
Le 31 janvier 2025, l’administration Trump a annoncé l’imposition de tarifs de 25 % sur la majorité des produits importés du Canada, à l’exception des produits énergétiques, qui seraient soumis à un tarif de 10 %. Ces mesures devraient entrer en vigueur demain, le 4 mars 2025, après une suspension initiale d’un mois visant à permettre des négociations sur des questions de sécurité frontalière.
Les dernières rumeurs nous portent à croire que le 25 % est gonflé et qu’en réalité, les tarifs pourraient être de l’ordre de 10 % tout secteur confondu. Mais qui vivra, verra…
Produits concernés et impact sur les consommateurs
Les tarifs proposés couvrent une large gamme de produits essentiels pour les consommateurs canadiens :
- Produits alimentaires : les fruits, légumes et autres produits agricoles importés des États-Unis pourraient voir leurs prix augmenter, affectant directement le coût de la vie des Canadiens.
- Produits manufacturés : les biens tels que les appareils électroménagers, les meubles et les équipements sportifs importés des États-Unis pourraient également être soumis à des hausses de prix en raison des tarifs.
- Produits énergétiques : bien que les produits énergétiques soient soumis à un tarif de 10 %, cette augmentation pourrait se répercuter sur les coûts de production et, par conséquent, sur les prix des biens et services au Canada.
Réactions et mesures de représailles du Canada
En réponse aux annonces de l’administration Trump, le gouvernement canadien a élaboré un plan de riposte visant à protéger ses intérêts économiques et à soutenir les consommateurs. Le Premier ministre Justin Trudeau a annoncé l’imposition de tarifs de 25 % sur des produits américains sélectionnés, notamment les boissons alcoolisées, les légumes, les vêtements, les chaussures et les parfums. Ces mesures visent à encourager les consommateurs canadiens à privilégier les produits locaux et à réduire leur dépendance aux importations américaines.
De plus, certaines provinces canadiennes ont pris des mesures spécifiques. Par exemple, l’Ontario a ordonné à la Régie des alcools de l’Ontario de cesser la vente de produits alcoolisés américains, tandis que le Québec a demandé à la Société des alcools du Québec de retirer tous les produits américains de ses étagères.
Conséquences économiques potentielles
Les tarifs proposés pourraient avoir des répercussions économiques significatives pour le Canada :
- Inflation : Les hausses de prix sur les produits importés pourraient entraîner une augmentation générale du niveau des prix, affectant le pouvoir d’achat des consommateurs.
- Emploi : Les industries canadiennes dépendantes des exportations vers les États-Unis pourraient être contraintes de réduire leurs activités, entraînant des pertes d’emplois.
- Croissance économique : Une réduction des échanges commerciaux avec les États-Unis pourrait freiner la croissance économique du Canada, compte tenu de l’interdépendance des deux économies.
Perspectives et solutions potentielles
Face à ces défis, plusieurs pistes pourraient être envisagées pour atténuer l’impact des tarifs sur les consommateurs canadiens :
- Diversification des partenaires commerciaux : Le Canada pourrait renforcer ses relations commerciales avec d’autres pays pour réduire sa dépendance aux importations américaines.
- Soutien aux industries locales : Des mesures pourraient être mises en place pour encourager la production locale et soutenir les entreprises affectées par les tarifs.
- Initiatives de sensibilisation : Informer les consommateurs sur l’importance d’acheter des produits locaux pourrait aider à maintenir la demande intérieure et soutenir l’économie nationale.
En conclusion, les tarifs que l’administration Trump menace d’imposer au Canada pourraient avoir des répercussions significatives sur les consommateurs canadiens. Il est essentiel que le gouvernement et les parties prenantes collaborent pour atténuer ces impacts et assurer la résilience de l’économie canadienne face à ces défis.
Au niveau de l’AQMAT, plusieurs actions sont posées dans l’immédiat, dont :
- une participation active à une coalition d’associations de l’industrie de la construction visant entre autres à convaincre le gouvernement Legault de relancer les projets institutionnels qui semblent sur la glace, à stimuler la rénovation et la construction résidentielles et à soutenir l’industrie manufacturière locale;
- deux sondages pour prendre le pouls des membres sur la question centrale de la solidarité envers les manufacturiers québécois et canadiens;
- un webinaire pour parler des impacts et des contre-attaques du point de vue de nos membres;
- un appui à la demande de subvention placée par « Bien fait ici » au Premier Ministre du Canada afin de faire connaître les produits canadiens;
- un appui à « Bien fait ici » pour que le programme adopte la couleur rouge du drapeau canadien.