Ma nature profonde est bousculée en ce début d’année où le froid extérieur souffle le chaud social.
Journaliste toujours, bien qu’ayant quitté ce métier il y a un quart de siècle, autant dire une éternité, je suis atterré devant l’exagération terroriste par laquelle on est rendu à assassiner même l’humour, dernier pan de la liberté, comme nous l’avait brillamment montré le film La vita e bella.
Parlant de films, j’ai vu hier Unbroken (Invincible), magnifiquement dirigé par Angelina Jolie, où le héros survit aux peurs et aux douleurs extrêmes que lui infligent la vie et les hommes. Ode à la résilience, à une certaine foi, au courage face à une certaine idéologie.
Bien que la tactique échoue depuis l’ère des conquêtes de continents jusqu’aux dernières tentatives en Irak ou en Afghanistan, on semble encore motivé à imposer aux autres notre modèle de civilisation – pourtant en crise elle-même. Ces « autres », que font-ils alors. Ils réagissent, les uns en se protégeant, les autres en attaquant. Il en résulte au mieux des dialogues de sourds, au pire des prises d’otages ensuite décapités.
Notre société malade génère à la fois la dégradation et la montée des solidarités.
En Europe, les Roms et d’autres migrants deviennent boucs émissaires. Ici, l’idéologie néo-libérale caractérisée par son manque de nuances sur le terrain va conduire à une certaine précarité de certains individus plus vulnérables, de certaines régions plus dépendantes du filet social.
Tournons la médaille de côté, voyons sa face positive. Je sens, je constate un réveil général. Sur la survivance d’un sexisme latent. Sur les dangers de la censure. Sur les risques collatéraux du caviardage d’un contrat social.
« Je ne vois pas, sinon dans l’inespéré, la lueur de l’espoir. »
Cette parole d’un homme plus grand que moi, plus grand que nous, Edgar Morin*, nous fait passer de la désillusion à la confiance quand on la lit une deuxième fois. Puis on se remonte le moral et les manches d’un autre cran (jeu de mots, ici!) quand on la lit une troisième fois. Je vous laisserai donc sur elle.
* Philosophe et sociologue, Edgar Morin a résisté au stalinisme, au nazisme pendant la Seconde Guerre mondiale, à la guerre d’Algérie et à bien d’autres formes de barbarie. À lire absolument pour sa clairvoyance, cette entrevue.