Le processus pour mettre fin à la grève en construction, qui dure depuis cinq jours, s’est enclenché avec le dépôt par Québec, il y a quelques minutes, de son projet de loi spéciale pour forcer le retour des 175 000 travailleurs sur les chantiers, le 31 mai.
Le projet de loi spéciale prévoit aussi cinq mois aux parties syndicales et patronales de la construction pour s’entendre. Après le délai, Québec choisira les sujets litigieux qui seront soumis à un arbitre.
Les députés débattront du projet à partir de 16 h, aujourd’hui. On prévoit que les discussions se poursuivront au courant de la nuit et que la loi sera adoptée quelque part aux petites heures du matin.
« Ce que nous venons faire aujourd’hui, c’est de mettre fin à la grève effectivement parce que ça a des impacts économiques majeurs pour le Québec, tout le monde le comprend », a indiqué la ministre Dominique Vien.
Cette dernière a aussi déploré le retard pris dans les négociations, qui se sont amorcées en février 2017, alors qu’elles auraient pu débuter en octobre 2016.
« Malgré les appels de la ministre et du ministère, il n’y a rien qui a bougé avant février 2017. Je ne sais pas s’ils se sont fiés sur l’adoption d’une loi spéciale du Parlement de Québec, mais il va falloir casser ça, cette histoire-là », a-t-elle continué.
De son côté, le premier ministre Philippe Couillard a parlé du « processus vicié » des pourparlers au cours desquels les parties attendent que le gouvernement « règle pour eux », en séance extraordinaire à l’Assemblée nationale, ce matin.
Le projet de loi spéciale ne mettra pas un terme à la négociation, a ajouté le premier ministre.
« Il va au contraire la relancer sur des bases beaucoup plus solides dans l’optique d’une résolution de conflit et dans l’optique où il faut qu’on sorte de ce mécanisme qui devient maintenant répété malheureusement au fil des années où finalement aucune partie ne semble avoir d’intérêt ou de volonté réelle de régler. […] Ce qui nous fait agir c’est l’intérêt supérieur du Québec », a continué le premier ministe du Québec, Philippe Couillard.
Plus de détails sur la loi sont à venir.
La FTQ réagit
La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) dénonce le dépôt d’un projet de loi spéciale pour forcer le retour au travail des travailleurs et travailleuses de la construction. « Par ce geste, le gouvernement de Philippe Couillard nie le droit à la libre négociation des 175 000 hommes et femmes qui ont décidé par une très forte majorité (plus de 93 %) d’exercer leur droit de grève pour se donner de meilleures conditions de travail et de meilleurs salaires. Il s’agit d’un coup de force qui doit être condamné », déclare le président de la FTQ, Daniel Boyer.
Le gouvernement doit laisser les parties régler ce conflit. « En s’immisçant ainsi dans la négociation, Québec brise le légitime rapport de force des travailleurs et travailleuses. Pour la FTQ, ce projet de loi est tout simplement illégal. Le gouvernement ne peut ignorer que le droit de grève est maintenant protégé par la Charte canadienne des droits et libertés depuis la décision de la Cour Suprême, qui a sévèrement rabroué le gouvernement de la Saskatchewan qui avait limité par une loi spéciale le droit de grève de ses employés. Le gouvernement Couillard sait très bien que ce projet de loi peut être contesté. Nous vivons dans un État de droit et la position du gouvernement ne tient tout simplement pas la route », ajoute le secrétaire général de la FTQ, Serge Cadieux. L’APCHQ se retire de la table de négociation, mais maintient son offre |
L’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) a le regret d’annoncer qu’elle s’est retirée de la table de négociation du secteur résidentiel alors qu’elle a déposé, vendredi soir dernier, une offre finale. En cours de négociation, l’APCHQ a fait plusieurs compromis et a considérablement bonifié ses offres salariales, mais aller aussi loin que le demandait l’Alliance n’était pas acceptable.
« Au cours des négociations, nous avons fait plusieurs compromis en plus d’accepter plusieurs demandes de l’Alliance syndicale. Nous avons offert des augmentations salariales supérieures à ce que nous offrions au départ et plus élevées que la hausse du coût de la vie. Malheureusement, cela n’a pas été suffisant pour la partie syndicale et devant ce constat, nous avons choisi de quitter la table de négociation », affirme le vice-président Développement stratégique et Communications de l’APCHQ, François-William Simard.
Des offres salariales bien au-delà de l’IPC
L’APCHQ estime qu’elle est allée le plus loin possible sur la question des augmentations salariales, compte tenu des perspectives économiques du secteur résidentiel pour les années à venir. En effet, elle a offert une augmentation moyenne de 1,9 % pour les quatre prochaines années. Rappelons que l’Indice des prix à la consommation a augmenté, en moyenne au cours des quatre dernières années, de 1 %. Les augmentations salariales proposées par l’APCHQ allaient donc bien au-delà de la simple protection du pouvoir d’achat des travailleurs. Par ailleurs, elle a aussi offert une bonification des frais de repas, chambre et pension en plus de l’ajout de deux primes salariales qui n’existaient pas jusque-là dans le secteur résidentiel.
Une offre finale toujours sur la table
Bien qu’elle se soit retirée de la table de négociation, l’offre finale présentée par l’APCHQ peut toujours être acceptée par l’Alliance syndicale. « Nous laissons notre offre finale sur la table, car nous croyons qu’il s’agit d’une proposition avantageuse pour les travailleurs. Nous sommes aussi d’avis que ce scénario est préférable à l’adoption d’une loi spéciale, qui ne ferait aucun gagnant», conclut M. Simard.