Remue-méninges des congressistes aqmatiens autour du tableau de bord prédictif le Périscope

Jeudi dernier, réunis à Saint-Hyacinthe, les délégués au Congrès des Décideurs de l’AQMAT se sont amusés, mais amusés sérieusement, à faire le design du tableau de bord qu’ils préféreraient avoir pour les aider au mieux à leurs prises de décisions. L’outil – qui portera le nom de Périscope – doit permettre aux quincailliers, aux groupements, aux distributeurs et aux manufacturiers de réduire leurs risques d’approvisionnement et d’embauche grâce à des données agrégées et fiables.

« Les comparatifs qui réfèrent à des périodes du passé, si elles demeurent utiles aux comptables, perdent cependant de leur fiabilité pour les chefs d’entreprise et leurs acheteurs tant tout change, et plus vite », déclare le président de l’AQMAT, Richard Darveau.

Ainsi, plusieurs des indicateurs retenant l’attention des parties prenantes visent à prévoir le marché et le comportement des consommateurs, des entreprises et des gouvernements dans le futur immédiat plutôt qu’à scruter les bilans. À cela s’ajoutent des données macro prenant en compte des facteurs externes pouvant influencer la rénovation et la construction.

Publié à une cadence mensuelle, mais comportant certaines données accessibles en temps réel, et commenté par des experts de la construction, de la finance, du commerce de détail et de l’industrie manufacturière, le tableau de bord entraînera les groupements d’achats et leurs marchands à travailler avec plus de cohésion avec leurs fournisseurs.

Le calendrier de déploiement prévoit la livraison d’une version « manuelle » en décembre 2023, fruit de nombreux partenariats humains. Une année plus tard, le Périscope devrait profiter des vertus de l’intelligence artificielle pour offrir la personnalisation du tableau de bord en fonction des besoins d’information propre à chaque utilisateur.

Les congressistes ont fait valoir la disparité de leurs besoins

Quand on regarde le nuage de mots qui ressort de l’atelier participatif, on remarque qu’aucun des indicateurs envisagés ne fait l’unanimité, ce qui tend à prouver que le Périscope devra présenter une plasticité propre à combler des profils d’utilisateurs variés.

 

Appelés à voter pour l’indicateur qu’ils considèrent « le plus essentiel », 83 répondants parmi les congressistes présents se sont emparés de leur téléphone cellulaire pour faire un choix en direct. Voici les résultats détaillés du vote virtuel.

Indicateur retenu Nombre de voix
Prix des matériaux 24
Mises en chantier 24
Ventes au détail 13
Flux de trésorerie 5
Démographie 3
Investissements en construction 2
Géopolitique 2
Permis de construire 2
Comportement d’achat 2
Pouvoir d’achat 1
Prix des matières premières 1
Disponibilité du stock 1
Taux d’emprunt 1
Délais de livraison 1
Quotas de production du bois d’œuvre 1

 

Points de vue complémentaires des trois panélistes

Afin de livrer les points de vue respectifs des groupements, des manufacturiers et des marchands, trois membres avaient été invités sur la scène du congrès hier.

Samuel Nadeau, CPA, directeur financier chez Couture TIMBER MART a été le premier à commenter l’outil du point de vue des marchands :

Samuel Nadeau, CPA, directeur financier chez Couture TIMBER MART . Après huit années comme comptable, puis auditeur, notamment chez RCGT et Deloitte, ce CPA détenteur d’une bourse d’excellence est entré il y aura bientôt sept ans chez Couture TIMBER MART qui exploite quatre succursales.

« Chaque jour amène son lot de défis, d’activités et d’imprévus. Il est important d’avoir accès à une source d’information fiable pour prendre le pouls de l’environnement dans lequel nous évoluons. Dans un contexte où les événements se déroulant à l’étranger résonnent localement, il est important d’ouvrir nos horizons et prendre conscience d’indicateurs pertinents à notre secteur d’activité. L’information est un atout majeur dans la prise de décision. Elle doit être fiable, neutre et communiquée en temps opportun. Voici quatre éléments qui, selon moi, sont essentiels pour favoriser l’utilisation de l’outil pour un quincaillier. Un tableau de bord permettant d’avoir un résumé efficient des informations :

    • il maximise l’utilisation de fenêtres réduites de temps pour prendre connaissance des grandes lignes des indicateurs ;
    • il ajoute des informations élaborées permettant d’assouvir la curiosité des utilisateurs face à des sujets qui les préoccupent ;
    • il accompagne les marchands dans l’analyse des impacts d’événements extraordinaires sur les activités à venir ;
    • finalement, il permet un type d’information neutre qui aide l’utilisateur à prendre des décisions selon sa stratégie et son modèle de gestion du risque.
    • Le Périscope sera un atout dans notre environnement qui évolue rapidement et où plusieurs décisions ont des impacts significatifs. »

Mélanie Belley, directrice des ventes chez CanWel Building Materials a parlé à son tour, cette fois pour livrer l’intérêt du Périscope pour le manufacturier et le distributeur.

« Le Périscope devrait être en mesure de fournir au même endroit toutes les informations, telles que l’évaluation des mises en chantier séparées en commercial et résidentiel ou encore les tendances boursières des matières premières comme le bois d’œuvre, les panneaux et les métaux, incluant toutes ces fameuses ‘’commodités ».

Mais une information majeure qui nous aidera à prendre de bonnes décisions de production (pour le manufacturier) et d’approvisionnement (distributeur) serait le comportement d’achats face à certains indices. Par exemple :

    • quand l’économie est à la récession, comment les marchands prévoient leurs achats?
    • quand les taux d’intérêt sont élevés, quel impact sur les décisions de stocking ou non?
    • comment on gère les guerres de prix pour des entrepreneurs qui se battent pour leurs projets?

En résumé, pour chaque indice qu’on peut retrouver dans le marché, le manufacturier et le distributeur vont les utiliser pour prendre certaines décisions, mais si on était en mesure de bien identifier les comportements d’achat en relation avec ces indices, nous serions encore plus en mesure d’être proactifs face à notre marché qui est constamment en mouvement. Je pense qu’en associant nos connaissances, celles des marchands, d’associations comme l’APCHQ et l’ACQ, nous, manufacturiers et distributeurs, nous serions plus forts. »

Avec 24 années d’expérience dans l’industrie de la construction, Mélanie Belley agit comme directrice des ventes chez CanWell Building Materials depuis six ans. Entre 2002 et 2016, elle agissait comme directrice du territoire québécois pour Metrie, fabricant et distributeur nord-américain de moulures en bois massif et en composite. »

Enfin, Martin Ménard a ajouté son grain de sel en se positionnant dans le rôle des groupements et bannières.

« Pour les groupements d’achats et les bannières, le périscope devrait être en mesure de fournir, au même endroit, toutes les informations telles que :

    • la projection des mises en chantier par région administrative;
    • les permis de construction et de rénovation accordés par les municipalités / par type d’habitation;
    • les fluctuation des coûts de transport maritimes et terrestre;
    • les prix des principales commodités et matériaux;
    • le prix des carburants;
    • les prix des principaux métaux et plastiques;
    • les taux de change US / Euro / Yuan / Canadien;
    • un indice des grandes banques quant à la situation économique, taux d’intérêt, etc.

En résumé, nous sommes à la recherche d’indices qui nous permettraient de mieux comprendre la mouvance du marché, d’anticiper autant que possible ceux-ci afin de nous permettre la mise en place de stratégies d’achats adaptées, de prendre des décisions éclairées et ultimement, de mieux répondre aux besoins de nos clients et des consommateurs. »

Que ce soit en tant qu’acheteur, directeur ou encore vice-président, Martin Ménard a évolué dans tout l’écosystème de la quincaillerie et des matériaux de construction durant les trente dernières années. Son parcours riche l’a notamment amené à travailler plus de 11 ans pour RONA, mais aussi plus de 13 ans pour BMR et trois ans chez CanWel. Aujourd’hui directeur principal d’Évolution Distribution à Saint-Jérôme, il est un senior en approvisionnement.

Du bricolage utile

En petits groupes de six ou sept, la centaine de délégués a joué à l’architecte ou au designer en imaginant ce que pourrait avoir l’air le fameux tableau de bord envisagé par l’AQMAT.

Après avoir fait le tour des tablées, Richard Darveau a synthétisé à chaud, en dix points, les différentes discussions.

  • Il faudra un tutoriel pour savoir comment interpréter et lire les données de l’outil; des bulles avec des points d’interrogation.
  • Il faudra un guide d’analyse, pour interpréter scientifiquement les données.
  • Les indices se doivent d’être constants dans le temps: si certains marchands ne sont pas disponibles pour donner l’info, d’un mois à l’autre, il ne faut pas que l’on perde l’échantillonnage nécessaire pour autant.
  • L’outil doit être disponible le premier jour ouvrable de chaque mois, avec un article récapitulatif et précédé d’une alerte aux abonnés.
  • Il serait cependant pertinent que l’accès à l’outil soit en tout temps pour les abonnés et que les dates de mises à jour de chaque donnée soit identifiées.
  • Il sera pertinent de séparer les indicateurs par familles, sans préjuger sur ce qui est plus essentiel, car les indices prioritaires vont différer selon qu’on est un marchand, un fabricant ou un groupement.
  • Deux niveaux de lecture devraient être proposés : un premier niveau sous forme de clin d’œil ou « snapshot », le deuxième avec plus de détails.
  • Parce qu’une image vaut mille mots, l’utilisation de couleurs (rouge, vert et jaune) ainsi que de flèches (montantes et descendantes) sont à incorporer dans le modèle.
  • Une version IA devra éventuellement permettre de personnaliser son tableau de bord.
  • Le Périscope doit être une exclusivité pour les membres en règle de l’AQMAT et ceux de ses éventuels partenaires; il pourrait être offert en option payante afin d’assurer les fonds nécessaires au projet.

Avec l’œil avisé du groupe-témoin d’experts que l’AQMAT a récemment composé pour élaborer une série d’indicateurs au futur Périscope, en plus des travaux au congrès et la tenue prochaine de négociations avec de nombreux partenaires envisagés, l’association est prête à entamer la suite du développement d’une première version du tableau de bord prédictif et collaboratif du marché.

La direction de l’AQMAT a remercié le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie pour avoir contribué financièrement à ces travaux préparatoires. Une deuxième demande de subvention suivra en mai pour terminer la conception d’une version 1.0 que l’AQMAT promet d’ici décembre 2023.

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