Encadrement légal du travail des enfants : accueil favorable avec ajustements nécessaires

Comment les joueurs clés du commerce de détail et du monde patronal réagissent-ils au projet de loi sur l’encadrement du travail des enfants connu (PL19)? Tour d’horizon des arguments mobilisés par les différentes organisations lors des consultations particulières qui ont eu lieu du 18 au 20 avril.

Rappelons d’abord que quelques jours avant le début des auditions publiques, l’AQMAT diffusait dans l’espace médiatique et politique ses commentaires officiels. Si on saluait l’esprit général du projet de loi et ses nouvelles balises afin d’assurer le plein développement des jeunes, on avait relevé que les nouvelles dispositions auront pour effet d’accentuer la pression mise sur les gestionnaires marchands, qui doivent effectuer toute une gymnastique pour assurer le bon fonctionnement de leurs entreprises avec des effectifs réduits et des horaires de travail déjà lourdement affectés. L’AQMAT avait alors souligné le besoin d’actions musclées pour convaincre plus de travailleurs expérimentés de demeure plus longtemps au travail, pour faire venir de la main-d’œuvre de l’étranger et pour automatiser les tâches qui peuvent l’être.

Le commerce de détail appuie le PL19 et priorise la sécurité des jeunes

Tout comme l’AQMAT, le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD) a relevé du PL19 qu’il est « essentiel de protéger la sécurité des jeunes travailleurs et de prioriser leur persévérance scolaire », mais aussi que les vacances estivales constituent pour les jeunes travailleurs un moment de choix pour le travail, n’interférant pas avec les jours d’école. La position du CCCD se démarque de celle de la quincaillerie et des matériaux de construction sur quelques points, puisque le premier demande des allègements supplémentaires jusqu’où n’est pas allée l’AQMAT. Entre autres :

  • considérer le vendredi comme faisant partie de la fin de semaine, pour ne limiter le travail des enfants en âge de scolarité à 10 h que du lundi au jeudi;
  • permettre l’étalement des heures sur une période de deux semaines;
  • retirer la limitation du nombre d’employés au sein d’une entreprise familiale;
  • permettre le travail des moins de 14 ans pendant les périodes de vacances et longs congés scolaires, et autres dérogations.

Pour sa part, le Conseil québécois du commerce de détail (CQCD) et ses membres « soutiennent entièrement le gouvernement dans ses démarches visant la protection des jeunes travailleurs au Québec, autant physique que mentale, ainsi que la persévérance scolaire et la réussite éducative à un haut niveau de priorité ». Même s’il accueille favorablement le PL19, le CQCD recommande de « réévaluer la période de 30 jours accordée aux employeurs » suivant la sanction liée au fait de transmettre une cessation d’emploi aux jeunes de 14 ans et moins à son emploi, qui ne pourront plus travailler, « afin de [la] prolonger jusqu’au début des vacances estivales ».

Le volet patronal adhère, mais critique

Après avoir consulté le texte du PL19, plusieurs associations patronales ont trouvé trop restrictive la « limite de moins de 10 employés » prévue pour les entreprises familiales concernées par l’encadrement du travail des enfants.

Pour la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), « Le travail en entreprise familiale vise à stimuler l’entrepreneuriat chez l’enfant, le sens des responsabilités et somme toute relève d’une activité qui forge des liens au sein d’une même famille. Cependant, le projet de loi 19 ajoute seulement les entreprises familiales de moins de 10 employés dans les exceptions. Pourquoi cette limite? Certaines entreprises embauchent plusieurs employés à temps partiel à certaines périodes de pointes, mais sont la majorité du temps dans des activités quotidiennes qui exigent la présence de 2, 3 voire 4 employés. La limite proposée créée des problèmes et devrait être révisée », soutient la FCEI.

La FCEI est favorable à la détermination par règlement des conditions qui permettront d’établir les exceptions. Elle croit cependant qu’il faut avoir les bonnes balises pour ne pas déconstruire ce qu’on vise à créer avec ce projet de loi, tout en assurant le bien-être du jeune dans le processus. C’est dans cet esprit qu’elle demande la création de lignes directrices strictes pour encadrer le processus des exceptions. L’objectif est de maintenir au centre de la démarche le bien-être de l’enfant et de déterminer les acteurs habilités à prendre une telle décision. Elle a donc soumis trois scénarios envisageables aux parlementaires :

  • des dérogations sur la base de l’avis de professionnels de la santé (psychiatre, psychologue, travailleur social, infirmier clinicien, etc.) qui assurent le suivi de certains enfants;
  • des dérogations sous avis favorable d’un représentant déterminé dans l’établissement scolaire fréquenté par l’enfant, conjointement avec l’accord de l’autorité parentale;
  • l’établissement de comités par région administrative, territoire de MRC ou encore sur la base de la délimitation des circonscriptions des centres de services scolaires, composés d’intervenants aptes à prendre une décision en considération du bien-être de l’enfant.

Bien qu’elle soutienne le projet de loi sur l’encadrement du travail des enfants, la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) appelle à la prudence quant à des mesures « trop restrictives » en raison d’un « manque de données ». La FCCQ recommande certaines clarifications du PL19, en plus notamment de permettre la mise en place d’ententes écrites ou par convention collectives pour étendre les heures de travail sur deux semaines.

Le Conseil du patronat du Québec (CPQ) est d’accord avec le contenu du PL19, puis rappelle au ministre du Travail l’importance de suivre les recommandations du Comité consultatif du travail et de la main-d’œuvre (CCTM). On retient que le CPQ demande à ce que les dates de cessation d’emploi correspondent au début de l’année scolaire.

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