Budget du Canada 2023 : de bonnes nouvelles, des mauvaises et quelques inconnues

Hier, exactement une semaine après le Québec, c’était au tour du gouvernement canadien de présenter son budget pour l’exercice du 1er avril 2023 au 31 mars 2024. Sous réserve de connaître la position de ses membres, la direction de l’AQMAT présente ce qu’elle perçoit comme bonnes et mauvaises nouvelles, aussi ce qui mérite un suivi avant de décider s’il faudra sourire ou grimacer.

Voici ce qu’il faut en retenir.

BONNES NOUVELLES

Économie d’impôt pour une fabrication plus propre: une enveloppe de 15,8 milliards permet d’accorder un crédit de 30 % aux manufacturiers qui choisissent de transiter vers un mode de production plus propre. Notons qu’il ne s’agit pas entièrement d’argent neuf, la majorité de ces fonds ayant été annoncés dans la Mise à jour économique de l’automne 2022.

40 000 $ libre d’impôt aux acheteurs d’une propriété: le compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP), promis dans le budget précédent, est confirmé et sera offert par les institutions financières à compter du 1er avril. La mesure pourrait aider à juguler la baisse constante du taux de propriété établi à 66,5 % en 2021 alors qu’il était à 69 % dix ans plus tôt, un ratio encore plus déséquilibré au Québec.

Protection contre les retards de paiements hypothécaires : face à l’inflation qui érode le revenu disponible par ménage, l’AQMAT appréciela ligne directrice à l’effet de « protéger les Canadiens ayant des prêts hypothécaires qui se trouvent dans des circonstances exceptionnelles » par le fait de s’assurer que les institutions financières « offrent un accès juste et équitable aux mesures d’allégement » : prolongation de la période d’amortissement, rajustement des échéanciers de paiement, autorisation des paiement forfaitaires.

À VALIDER (mesures dont on attend les détails pour les placer dans les bonnes ou mauvaises nouvelles)

Frais d’interchange diminués: encore une concession volontaire obtenue de Visa et MasterCard par le gouvernement, les coûts exigés aux marchands sur chaque transaction par carte de crédit devraient être réduits bientôt de l’ordre de 27 %. On promet que les points de récompense promis aux consommateurs seront protégés, mais cela est laissé à la discrétion du duopole. L’AQMAT aurait préféré et continuera de militer pour qu’un taux fixe soit exigé des commerçants, peu importe la nature de la carte, comme cela se fait dans de nombreux pays par un encadrement législatif.

Frais indésirables cachés: dans la même veine que les frais d’interchange, mais cette fois pour les consommateurs, le gouvernement entend sévir contre les frais arbitraires d’itinérance exigés par les entreprises de télécommunications lors de voyages de même que sur les frais de bagages devenus la norme chez les transporteurs aériens, également contre les frais excédentaires chargés sur des billets de concerts. Le même resserrement est annoncé concernant les frais d’expédition de plus en plus en vogue avec les achats par Internet. Mais que veut dire le verbe « sévir » exactement ? À suivre…

Droit à la réparation des électroménagers: dans le but de réduire les déchets, le gouvernement fédéral travaillera à établir un droit à la réparation avec l’objectif de mettre en place un cadre ciblé pour les appareils électroménagers et électroniques dès 2024. Il reste à voir quelle sera la charge logistique et financière qui sera transportée sur les épaules des marchands et des fabricants de ces équipements.

MAUVAISES NOUVELLES

Rien de nouveau face à la crise du logement : malgré un taux d’inoccupation des logements locatifs qui est descendu à 1,9 % l’an dernier au pays alors que le taux moyen pour la période allant de 1990 à 2021 était de 3,2 % et nonobstant le plus récent rapport de la Société canadienne d’hypothèques et de logement qui estime que pour rétablir l’abordabilité, 3,5 millions de logements abordables soient nécessaires d’ici 2030 – dont 620 000 au Québec – le budget présenté par la ministre Freeland est muet. La seule mention dans le budget d’hier stipule que le gouvernement continuera de « soutenir la réaffectation du financement du volet de réparation du Fonds national de co-investissement pour le logement à son volet de construction ».

Rien pour encourager l’efficacité énergétique dans les bâtiments : sauf erreur, le budget n’introduit aucun nouveau programme pour encourager la rénovation écoénergétique alors que l’habitation représente un des principaux vecteurs d’émission de gaz à effet de serre ; les seules mesures en vigueur sont une subvention allant jusqu’à 5 000 $ pour les rénovations domiciliaires et jusqu’à 40 000 $ pour les rénovations en profondeur.

Report de l’équilibre budgétaire : prévu pour l’année financière 2027-2028, l’équilibre budgétaire n’est plus dans les plans du gouvernement libéral. « Si le ratio dette/PIB se compare avantageusement à l’ensemble des pays de l’OCDE, il reste que les revenus supplémentaires en taxes à cause de l’inflation auraient dû représenter le parfait moment pour tout rééquilibrer et ainsi avoir les moyens de faire face à la récession de plus en plus probable à la fin de 2023 ou au début de 2024, estime Richard Darveau, président de l’AQMAT.»

Comment le budget est-il reçu ailleurs?

Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) salue la volonté du gouvernement fédéral de mettre de l’avant une politique “Acheter nord-américain” avec les États-Unis, ce qui permettra d’assurer une véritable relation d’affaires stratégique avec notre principal partenaire commercial. MEQ accueille aussi favorablement la mise en place d’un bureau des chaînes d’approvisionnement des transports. L’instauration d’un crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre et celui à l’investissement dans la fabrication de technologies propres sont également saluées. L’association déplore cependant l’absence d’aides directes, de subventions industrielles, à l’image de ce que font les États-Unis.

 

La Canadian Home Builder’s Association (CHBA) se dit soulagée qu’il n’a pas été question dans le budget de resserrer davantage les règles hypothécaires, d’augmenter les taux d’intérêt ou d’autres mesures qui pourraient freiner davantage la demande en construction.

L’association continuant d’insister auprès du gouvernement sur la nécessité de remédier à la pénurie de travailleurs qualifiés dans l’industrie, elle apprécie l’engagement renouvelé du Canada d’accueillir 500 000 immigrants par année ainsi que les mesures fiscales ciblées pour les gens de métier canadiens grâce à la déduction pour mobilité de la main-d’oeuvre et au doublement de la déduction pour frais d’outillage. La CHBA souligne également les initiatives visant à soutenir les apprentis de première année dans les métiers de la construction et à fournir aux employeurs une enveloppe de 5 000 $ afin de couvrir les coûts initiaux comme le salaire et la formation, même deux fois plus lorsqu’il s’agit de travailleurs considérés comme issus des minorités.

Enfin, l’association avoue continuer de militer en faveur d’un rehaussement de la période d’amortissement à 30 ans pour les primo-accédants et la réduction du test de résistance, des positions que ne partage pas en bloc la direction de l’AQMAT. Commentaire de Richard Darveau, président : « Il faut protéger les consommateurs contre le surendettement qui nuit à leur capacité de consommer, ce que peut engendrer un amortissement trop long et un test de résistance financière allégé. »

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